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Nouvelle offensive contre l’indemnité d’éloignement des fonctionnaires d’État


Après la sénatrice autonomiste Lana Tetuanui en 2022, c’est le député Tavini Tematai Le Gayic qui s’apprête à déposer une proposition de loi visant à supprimer cette indemnité accordée aux agents de l’État mutés en Polynésie. Une prime qui peut atteindre l’équivalent de « 20 mois de traitement sur quatre ans », et qui ne serait, pour le jeune élu indépendantiste, ni « justifiée » ni « nécessaire » aujourd’hui. Ce qui n’empêche pas les syndicats d’être opposés à la suppression de cet « acquis ».

Un article unique, et le même libellé, ou presque, que celui qui avait été mis sur la table par Lana Tetuanui en août 2022. C’est désormais le Tavini qui est à la manœuvre et du côté de l’Assemblée Nationale plutôt que du Sénat : Tematai Le Gayic doit y faire enregistrer « d’ici demain » sa proposition de loi visant à supprimer l’indemnité d’éloignement des fonctionnaires d’État en Polynésie française. Une prime touchée par les agents de l’État mutés dans le Pacifique et certains autres territoires (Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon notamment) à condition qu’ils n’y aient pas leur Centre des intérêts matériels et moraux. Pas question de « décider pour les autres » : il s’agit bien d’exclure le fenua de ce dispositif, « qui est sûrement encore utile ailleurs ».

La Polynésie « n’a plus de problème d’attractivité »

Cette indemnité, censée compenser les désagrément d’un déménagement lointain pour des agents métropolitains, se calcule en fonction du statut marital et des enfants à charge. Mais elle correspond peu ou prou à cinq mois de traitement indiciaire brut à l’arrivée et au départ d’un séjour de deux ans. « Ça représente 20 mois de traitement sur quatre ans ce qui est souvent la durée de séjour d’un fonctionnaire », pointe Tematai Le Gayic. Le jeune élu rappelle que cette prime très incitative a été créée en 1950, quand « les déplacements se faisaient en bateau », rendant l’accès au fenua long et difficile, que l’écart de niveau de vie entre la Polynésie et l’Hexagone était criant, que l’État, pour structurer l’administration locale, devait attirer « de grande quantité de fonctionnaires », et que les compétences locales étaient rares.

« Aujourd’hui, on est en 2023, il n’y a plus de problèmes de transports, plus de problème d’attractivité, et l’indexation est l’outil qui correspond à la lutte contre la vie cher : si l’État estime que ses fonctionnaires sont lésés sur cette question, il n’a qu’à modifier le point d’indexation, insiste-t-il. Mais les primes d’installation et d’éloignement n’ont plus lieu d’être. Surtout quand on voit que lorsqu’on demande une prime d’installation et d’éloignement pour les fonctionnaires originaires de Polynésie qui sont mutés en France, on ne leur permet pas de l’avoir. S’il n’y a pas de réciprocité, pour nous, il faudrait tout supprimer ».

Levée de bouclier des syndicats

La réciprocité, c’est justement ce que demandent les syndicats de la fonction publique d’État. « Notre position n’a pas changé depuis la proposition de Lana Tetuanui. Cette indemnité est un acquis qu’il faut préserver. Ce qu’on a suggéré à la sénatrice, c’est plutôt de se battre pour faire appliquer la réciprocité ». Une réciprocité jugée impossible par Paris du point de vue juridique, la prime étant attachée à un territoire en particulier, et non à des fonctionnaires en fonction de leur origine. Même opposition à l’idée du côté de Force Ouvrière, dont le chef de file, Patrick Galenon avait été le premier à lever le bouclier lorsque le Sénat avait été saisi de cette proposition – qui n’avait pas passé la première lecture. Les militants syndicaux estiment en outre que cette prime a encore son utilité pour les positions « dans lesquelles il n’y a pas de vivier local, et que des compétences spécifiques sont recherchées ».

Tematai Le Gayic n’est pas de cet avis citant l’exemple, soufflé par Mereana Reid-Arbelot, de la tour de contrôle de Guadeloupe : « ils ont supprimé la prime d’éloignement, et au lieu de 80 candidat par poste, il y en avait 10 ». Assez, d’après lui, pour trouver un fonctionnaire de qualité, et pas trop, non plus, pour ne pas boucher la voie aux fonctionnaires d’État polynésiens candidats au retour au pays. « Cet avantage demeure encore tellement incitatif qu’il porte préjudice au retour de nos fonctionnaires d’État polynésiens dans leur collectivité », écrivait ainsi, en 2022, Lana Tetuanui. Tematai Le Gayic aura-t-il davantage de chance au Palais Bourbon que sa collègue autonomiste au Palais du Luxembourg ? À voir. Le député Tavini ne souhaite pas, en tout cas, utiliser la « niche parlementaire » de son groupe GDR, au mois de mai, pour ce texte – on veut y faire passer des propositions « beaucoup plus importantes ». Ce qui implique de discuter avec la présidente de l’Assemblée et la majorité présidentielle pour obtenir la mise aux voix de la proposition.

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1 Commentaire

  1. Tera
    29 janvier 2024 à 20h37 — Répondre

    pur jalousie. Une famille d expat obligée de revenir en métropole suite à un décès familiale et c est 4 billets d avion à acheter dans l urgence.
    L’indexation est d’avantage à remettre en cause. Sans taxe foncière et surtout sans impôt sur le revenu, le coût de la vie est pratiquement le même que sur Paris. Une véritable aubaine, pour les moyens et hauts salaires

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