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Rassemblement « antivax » à l’entrée du centre de vaccination de Papeete


La campagne de vaccination contre le Covid a été officiellement lancée ce matin, dans trois centres de Tahiti et Moorea. Mais au kiosque info-santé de Paofai, les volontaires, personnes âgées ou souffrant de maladies graves, ont été « accueillies » par une poignée de militants, bien décidés à les faire changer d’avis.


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Ils n’étaient qu’une vingtaine à s’être rassemblés à Paofai, ce matin. Mais ils disent représenter « la majorité de la population et du peuple maohi ». Sur les pancartes, bien visibles des automobilistes : « nous ne sommes pas des cobayes », « je ne veux pas être un OGM » ou encore « on ne touche pas à la création de Dieu ». Très actifs sur les réseaux sociaux, ces militants – beaucoup avaient déjà participé, en septembre, à la manifestation anti-masque – cherchaient surtout à s’adresser aux personnes se rendant au Kiosque Info Santé, un des trois centres de vaccination déjà ouverts avec les hôpitaux de Taravao et de Moorea. Des septuagénaires et octogénaires, pour la plupart, puisque, en tant que principales victimes de l’épidémie de Covid, ce sont les seuls concernés par cette première phase de la campagne non-obligatoire et gratuite. Objectif : les faire renoncer à leur injection.

« Il est urgent d’attendre »

« On ne les bloque pas, on n’en a pas le l’autorité, mais on discute avec eux, on leur dit ce qu’on sait », explique Eugène Tetuanui, un des porte-paroles désignés par le collectif. Ce que savent – ou pensent savoir – les militants : ce vaccin contre le Covid « n’a pas prouvé son efficacité », « les sommités scientifiques débattent » de son innocuité, la Polynésie est « un territoire pilote » dans la vaccination… La rapidité de développement de ces vaccins, qui est, il est vrai, exceptionnelle, mais aussi très explicable, est aussi mis en avant. « Devant tous les questionnements qu’il y a sur ce pseudo-vaccin, il est urgent d’attendre », insiste le porte-parole.

Dans le petit groupe, on s’échange les dernières « infos », pour beaucoup tirées de vidéos YouTube ou glanées sur Facebook. Peu d’entre elles rappellent que plus de 40 millions de personnes ont déjà reçu au moins une dose de vaccin dans le monde, dont près de 500 000 en France. Ou qu’aucun décès n’a pour le moment été imputé au vaccin Pfizer-BioNtech, utilisé en Polynésie. Ou encore que les vaccins ARn, comme celui de Pfizer, n’impliquent aucune modification du génome. Persuadés que l’environnement public et médiatique cherche à cacher le danger des vaccins – Eugène Tetuanui parle « 2,5 à 3% » de létalité de l’injection, un chiffre effrayant mais corroboré par aucun document – les militants font aussi le lien avec l’histoire du nucléaire au fenua. « L’État a démissionné de son accompagnement pour les familles victimes de la bombe atomique, reprend le porte-parole, qui est aussi président de la Fédération Faatura te rahu a te Atua. Mais nulle part on voit que l’État va accompagner les éventuelles victimes du vaccin ».

Chloroquine, prière, Bill Gates et la 5G

Mais alors quelles alternatives au vaccin pour limiter les décès – bien réels, ce dont semblent douter certains militants – et pour envisager une sortie de crise sanitaire ? C’est là que les avis divergent. Certains mettent en avant des traitements comme l’hydroxychloroquine – dont à peu près tout le monde, y compris l’équipe de Didier Raoult, reconnait aujourd’hui qu’elle ne réduit pas la mortalité due au Covid -,  ou l’ivermectine, un traitement anti-parasitaire qui bénéficie à son tour d’une forte popularité sur internet. D’autres, plus méfiants à l’égard de « Big Pharma » et des médicaments, parlent plutôt de « développer le système immunitaire par une alimentation saine », ou mettent en avant « ra’au locaux », voire la prière… Seul point commun : la critique de la gestion par les autorités d’une pandémie « exagérée », voire même, selon certains, « inexistante ».

Une question ne fait pas consensus : pourquoi les autorités feraient la promotion de produits inefficaces voire dangereux ? Pourquoi s’appuyer sur ces vaccins s’ils n’aident pas à résoudre une crise qui coûte des milliards en perte d’activité ? Sur les réseaux sociaux, les réponses sont très affirmées, souvent extravagantes. Elles le sont moins dans les micros. L’idée qu’une « puce 5G » ou un autre instrument de « contrôle des populations » soit injecté en même temps que le vaccin n’a pas complètement disparu des esprits mais n’est pas partagé par tout le monde. « Je suis plein de doute, répond prudemment Eugène Tetuanui. Et quand j’entend parler d’un éventuel Ordre mondial, des noms comme Bill Gates ou de financements occultes, ça fait peur ».

Les « antivax » – qui réfutent ce terme, se présentant davantage comme « sceptiques » – prévoient d’autres actions de ce type, à Paofai, mais aussi à Taravao dès mardi.

Des vaccins testés sur des milliers de patients

Du côté de la direction de la Santé, on regrette bien sûr ce genre de manifestation, qui pourrait faire tourner les talons à certains candidats à la vaccination. Notamment des personnes âgées ou malades, qui sont les premières victimes d’une épidémie qui a déjà tué 127 personnes au fenua. Il y a quelques semaines le Dr Sabine Henry, responsable du bureau de veille sanitaire, rappelait que ces produits avaient fait l’objet de tests très poussés sur plusieurs milliers de personnes. Des essais qui ont été contrôlées par les autorités sanitaires, qui n’ont bien entendu aucun intérêt à laisser mettre sur le marché un produit au rapport bénéfice/risque négatif.

La médecin rappelait aussi que plusieurs facteurs pouvaient expliquer l’exceptionnelle rapidité du développement de ces vaccins : tournant technologique, séquençage très rapide du génome du virus, mobilisation massive des états, des laboratoires et des volontaires, et circulation très active du virus dans le monde entier, ce qui a réduit les temps d’essais.

Leur efficacité pour réduire le nombre de cas graves et leur innocuité est donc établie. Il reste tout de même des questions sur la durée de la protection offerte par les vaccins ou sur leur intérêt pour empêcher la transmission dans le cadre de porteurs asymptomatiques. Pour tout renseignement sur la vaccination, la direction de la Santé a mis en place une page dédiée et un numéro vert : le 40 455 000.

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1 Commentaire

  1. 19 janvier 2021 à 5h35 — Répondre

     » « ra’au locaux », voire la prière… » Le Covid avec ce genre de conseils aurait été depuis longtemps balayé du pays, mais pour l’instant c’est pas très efficace. Chacun est libre d’accepter le vaccin ou pas, mais de là à venir « donner » des conseils aux gens qui se rendent au kiosque et leur dire ce « qu’ils savent « …on marche sur la tête. Les réseaux sociaux, You Tube, toutes ces mises en garde de ces « moi je sais » qui gobent tout ce qu’ils lisent ou tout ce qu’on leur dit à l’oreille et qui insufflent le doute chez les volontaires du vaccin. C’est pas malin et surtout c’est refuser la protection des leurs.

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