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Coronavirus : la Polynésie dépiste-t-elle suffisamment sa population ?


Le Pays a dépassé, ce jeudi, le plafond des 1 000 personnes testées au Covid-19. Un rythme de dépistage bien moindre que certaines collectivités, ou même que la métropole… Pour une épidémie apparemment mieux maîtrisée. Tester pour tester « n’est pas utile », répètent les autorités qui visent uniquement les personnes présentant des symptômes, même légers. L’objectif : « gagner en visibilité » avant, peut-être, de commencer à « déconfiner ».

1 051. C’est le nombre de personnes dépistées au Covid-19 depuis le début de l’épidémie, d’après la cellule de crise sanitaire du Pays. Cet effort de dépistage avait commencé dès la fin du mois de janvier, auprès des voyageurs présentant des symptômes suspects. Dans l’attente d’un éventuel « pic épidémique », toujours pas identifié, et qui pourrait ne jamais apparaître, la préservation des capacités de tests est longtemps restée une priorité pour les autorités. Ainsi, au 15 mars, seuls 80 dépistages du Covid-19 avaient été menés au fenua. Le rythme s’est ensuite accéléré à l’Institut Malardé, qui – avec le CHPF, concentré sur les cas graves – abrite le seul laboratoire d’analyse des prélèvements nasopharyngés. L’ILM avec notamment son « drive » de Paofai a depuis réalisé en moyenne 30 dépistages par jour, avec une nette augmentation depuis le 7 avril.

Un dépistage moins soutenu que dans d’autres territoires du Pacifique, et en-dessous de la moyenne nationale

La Polynésie a-t-elle « assez testé » ? La question a animé beaucoup de conversations, depuis le début de la crise.  Il est vrai que la seule collectivité réellement comparable au fenua, la Nouvelle-Calédonie, a déployé un effort plus conséquent, tout au long de son confinement. Avec 3 094 tests réalisés jusqu’à mercredi, nos voisins du Pacifique ont en moyenne dépisté trois fois plus que la Polynésie, grâce à des stocks de tests plus importants. D’autres pays de la zone, comme la Nouvelle-Zélande (plus de 70 000 tests pour près de 5 millions d’habitants, d’après les dernières données) ou l’Australie (380 000 tests effectués pour près de 25 millions d’habitants), ont développé une politique de dépistage encore plus intense ces dernières semaines.

Quid de la métropole ? D’après les chiffres officiels en date du 9 avril, 333 807 tests avaient été menés, dans les hôpitaux de l’Hexagone. Un rythme plus de 5 fois inférieur à celui de la Polynésie si on le rapporte à la population.  Mais comme l’a récemment expliqué le ministre national de la Santé Olivier Véran, ce chiffre est incomplet. Il n’intègre pas la plupart des laboratoires privés, qui pratiquent eux aussi beaucoup de tests. Le ministre parisien estime que le pays a réalisé près de 150 000 tests la semaine passée. Pour s’inscrire dans le même rythme, la Polynésie devrait réaliser plus de 600 tests par semaine… Elle en est loin. 259 tests ont été pratiqués ces 7 derniers jours, même si les 73 tests de ces dernières 24 heures indiquent, comme l’avaient annoncé les autorités, une nette montée en puissance du dépistage.

Paris et Papeete partagent en revanche les mêmes objectifs pour les jours à venir : les 120 tests par jour annoncés par la directrice de la Santé au fenua correspondent peu ou prou au cap des 200 000 tests par semaine fixé, au niveau national, par Olivier Véran.

Les mêmes objectifs de dépistage à Paris et à Papeete

Voilà pour l’arithmétique. Mais comme l’a rappelé mercredi Sean Casey, expert de l’Organisation mondiale de la Santé attaché à la cellule de crise sanitaire du Pays, « tester pour tester, ça ne sert à rien ». L’effort de dépistage doit surtout être adapté à l’importance de la circulation de la maladie. Il serait donc normal que la métropole, où le taux de contamination confirmé est 8 fois plus élevé qu’au fenua, dépiste davantage.

Pour Sean Casey ce sont, les consignes sanitaires, et pas les tests, qui permettent de limiter la maladie. Et « les mesures agressives » qui ont été prises par le Pays au début de l’épidémie ont « jusqu’à maintenant permis de préserver sa population » explique le spécialiste des crises sanitaires. Il est vrai qu’au sein de l’outre-mer français, les collectivités du Pacifique sont les plus épargnées. Aucun cas à Wallis-et-Futuna, 1 cas pour 15 000 habitants en Calédonie, et 1 pour 5 000 en Polynésie. La Guadeloupe, la Martinique, la Réunion ou la Guyane, avec 1 cas pour 2 000 à 3 000 habitants, sont presque deux fois plus touchées que la Polynésie. Mayotte l’est encore plus durement.

Le dépistage aujourd’hui limité par les signalements de symptômes

Le Pays, qui attend de nouvelles livraisons de matériel médical, est tout de même engagé sur une trajectoire d’intensification du dépistage. La directrice de la Santé Laurence Bonnac-Théron a assuré mardi que les stocks permettaient de réaliser 120 tests par jour pendant dix jours. Et le Dr Teanini Tematahotoa, attachée au bureau de veille sanitaire, a confirmé hier que l’objectif était d’atteindre ce palier en dépistant « toutes les personnes qui présentent des symptômes ». Fièvre, toux, gorge qui gratte ou irritations…Pendant de longue semaines, pourtant, certains médecins traitants ont conseillé à des patients de rester confinés plutôt que de sortir de leur domicile pour aller se faire tester. « Ils ont eu raison, mais aujourd’hui qu’on est plus à l’aise sur ces tests, on va pouvoir vérifier », explique Teanini Tematahotoa.

Le nombre de dépistages serait aujourd’hui limité par les remontées de personnes présentant des symptômes, plus que par la quantité de tests disponibles. Le Pays appelle donc à se faire connaître, auprès de son médecin traitant ou d’une clinique, dès l’apparition de symptômes suspects.  L’objectif : gagner en visibilité sur l’épidémie. Une visibilité essentielle pour pouvoir prendre des décisions sur l’avenir des consignes sanitaires… dont le confinement.

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