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En 2030, des Polynésiens plus vieux, mais pas beaucoup plus nombreux

Pyramide des âges en 2018 (courbe violette) et en 2030 (barres bleues et violettes) @ISPF


D’après les dernières projections de l’ISPF, la population polynésienne va se « stabiliser » autour de 284 000 habitants, soit environ 5 000 de plus qu’aujourd’hui. La part des plus de 60 ans augmente en flèche, soulevant beaucoup de questions économiques, sociales et sanitaires. Parmi les leviers évoqués pour rééquilibrer la pyramide des âges : l’immigration, aujourd’hui déficitaire.

« Au 31 décembre 2030, la Polynésie compterait 284 000 habitants ». Voilà la prévision mise sur la table ce mardi par l’Institut de la statistique de la Polynésie française(ISPF), sur la base des chiffres du recensement de 2017. L’étude comptait alors 276 000 habitants, auquel se sont depuis rajoutées 2000 à 3000 personnes. Pour faire cette estimation l’institut s’est appuyé sur plusieurs scénarios en terme de fécondité, d’espérance de vie et de migration. Selon les hypothèses moyennes, le risque de décès diminuerait légèrement, le nombre d’enfants par femme, qui a beaucoup baissé ces dernières années, restera stable… Au final, l’augmentation naturelle de la population serait en partie compensée par le solde migratoire qui resterait négatif (lire plus bas). A force de ralentir, l’accroissement de la population finirait donc par se « stabiliser », d’ici fin de la décennie. Les autres scénarios sur la table, sont moins probables mais ne donnent pas des résultats si éloignés : entre 274 000 habitants (soit une diminution) et 292 700 en 2030.

Les explications du directeur de l’ISPF, Nicolas Prudh’omme :


Beaucoup plus de seniors, un peu moins de jeunes

Si ce n’est par sa taille, c’est par son âge que la population polynésienne devrait évoluer. « La part des personnes âgées de 60 ans et plus passerait de 13 % en 2018 à 19 % en 2030 », écrit l’ISPF. Un constat qui traverse tous les scénarios, et qui a de quoi interpeller les élus : c’est 19 000 seniors de plus, soit 54 000 au total, qui devront être pris en compte dans les politiques sociales ou sanitaires. « Une augmentation de 55 % en 12 ans », là où l’accroissement de la population n’est que de 2 %. Pourquoi cette évolution ? « La structure de la population actuelle », répond l’institut qui rappelle que le nombre de naissances baisse depuis 1980

La population jeune devrait au contraire connaître un déclin. Une baisse de 13 % d’ici 2030 pour atteindre 74 000 Polynésiens de moins de 20 ans . « Pour accroître le nombre de jeunes, la fécondité devrait remonter de manière significative à 2,3 enfants par femme et ceci, dès 2020 » écrit l’ISPF. Improbable. La même observation peut être faite pour les moins de 15 ans : de 62 000 jeunes en 2018, le fenua atteindrait 53 000 en 2030. Avec des implications en terme de politiques publiques : « La population en âge d’être scolarisée diminuerait », prévient l’institut.

L’immigration à la rescousse ?

Plus largement, ces nouveaux équilibres « vont engendrer une évolution forte des rapports de dépendance ». En 2030, on devrait compter 61 personnes de moins de 15 ans ou de plus de 60 ans pour 100 personnes de 15 à 59 ans, ceux qui paient l’essentiel des taxes et cotisations sociales. « Pas sans conséquence sur la situation sanitaire et économique », note l’institut. Seule hypothèse évoquée pour redresser la barre : l’immigration. L’espérance de vie variant très lentement, et la fécondité suivant une courbe relativement stable, « les hypothèses de migration ont le plus fort impact sur l’évolution du nombre d’habitants » relève l’ISPF. « Si l’on souhaite conserver un rapport de dépendance stable entre les 15-59 ans et les 60 ans et plus sur la période 2018 à 2030, il faudrait atteindre 102 000 personnes supplémentaires âgées de 15 et 59 ans en 2030 », écrit l’établissement public polynésien. Cela représente 8 500 installations supplémentaires dans le Pays chaque année. Là encore, le chiffre parait improbable. Pour Nicolas Prud’homme, le vieillissement de la population est « inéluctable » : mieux vaut donc s’y préparer tout de suite.

A noter qu’entre 2012 et 2017, la Polynésie avait connu plus de départs que d’installations (ou de retours de Polynésiens), pour un solde migratoire déficitaire de 1 100 personnes par an. Si la situation économique ou politique a pu jouer sur ce chiffre, c’est surtout le départ régulier des étudiants, dont bon nombre ne reviennent pas s’installer au fenua, qui pèse sur le solde. Dans son « scénario moyen », l’ISPF a considéré que chiffre ne varierait pas dans la décennie à venir.

Moins d’espérance de vie et moins de fécondité que prévu

L’ISPF insiste elle-même sur « l’imprévisibilité de certains phénomènes » et n’hésite pas à jeter un regard critique sur ses projections passées. En 2009, le même institut prévoyait par exemple 292 000 habitants en 2017… Le recensement effectué cette année-là n’en a compté que 276 000. Dans le détail, « les tendances » anticipées se sont confirmées, mais elles ont différé des prévisions par leur ampleur. Ainsi la fécondité a davantage baissé que prévu (1,8 enfants par femme en 2017 contre 2 prévue une décennie plus tôt), l’espérance de vie a moins augmenté (73,8 au lieu de 75,4 ans pour les hommes et 77,6 ans au lieu de 79,9 ans pour les femmes), et le solde migratoire a bien été négatif.

 

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1 Commentaire

  1. Tohivea
    19 août 2020 à 10h59 — Répondre

    Le Semeur Tahitien a édité un article sur cette question il y a un an alertant sur la décroissance démographique, à partir des données ISPF. À la fin de ce siècle nous serons retourné au nombre d’il y a 20 ans, après la vague de décès des « vieux ».

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