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Assemblée : le « Rob d’Halloween » débattu à couteaux tirés

©MB/Radio1

Symbole d’une politique « cohérente » et « solidaire » d’après l’exécutif, le rapport d’orientation budgétaire (Rob)  a été attaqué pour son manque de « concret » et de « vision » par l’opposition. Mais à 6 mois des territoriales, les options budgétaires passionnent moins à Tarahoi que les tacles, pics et autre invectives. Le ton est particulièrement monté entre Teva Rohfritsch qui a moqué un « Rob d’Halloween » qui « nous plonge dans l’obscurité » et Édouard Fritch, qui a qualifié son ancien vice-président de « démagogue » et de « petit jeunot mal élevé ».

Lire aussi : Salaires, solaire, accès au logement : le détail des mesures fiscales du bouclier anti-inflation

Matinée houleuse, ce lundi, à l’assemblée. À l’ordre du jour, le rapport d’orientation budgétaire, présenté chaque année par le gouvernement aux élus avant de rentrer dans le fond des débats sur le projet de budget. Un projet qui entend « préserver la cohésion, l’emploi et la solidarité » comme l’a expliqué Édouard Fritch aux élus. Fixant aux premiers rangs des priorité la politique du logement, l’accélération de la transition énergétique et la réponse à l’inflation, le président se félicite que les options retenues voilà un an « commencent à payer » et rappelle les grandes mesures économiques sociales et fiscales, annoncées ou adoptées ces dernière semaines et pour certaines détaillées par le ministre des finances vendredi dernier. « Le cap adopté par le gouvernement depuis le début est le bon », insiste le chef de file du Tapura, pas de raison, donc, de se dérouter.

Les débats auraient pu se concentrer sur les options budgétaires retenues par l’exécutif, l’état des finances, qui a fait l’objet d’un éclaircissement d’Yvonnick Raffin, ou certaines grandes politiques, sur le social ou les grands chantiers, que les ministres présents ont pris soins de détailler. Mais cette session budgétaire est la dernière de la mandature, les territoriales qui y mettront fin, programmées pour avril, sont déjà dans toutes les têtes. Pour preuve : de tous les côtés de l’assemblée, on s’accuse d’être « déjà en campagne », et les échanges politiques ont rapidement pris le dessus sur le débat budgétaire ce matin. Et c’est le président du Pays qui dégaine en premier, répondant, dès son discours d’ouverture, aux « donneurs de leçon » et notamment « ceux qui ont quitté la majorité pour des raisons obscures ». « C’est facile lorsqu’on bascule dans l’opposition de dire « y a qu’à, faut qu’on » », ironise le président. Pas de noms, mais Teva Rohfritsch et Nicole Bouteau, désormais non-inscrits, et dont le chef de file du Tapura avait jusque là évité de commenter le départ du camp rouge, son dans le viseur. Ça n’engage à rien sauf à dire qu’on peut, qu’on aurait pu, ou qu’on pourrait faire mieux que le gouvernement ».

Pas de « changement de logiciel » en vue

A here ia Porinetia et ses deux anciens parlementaires, qui ont quitté le Tapura depuis plus longtemps, ne sont pas épargnés. Et notamment Nuihau Laurey qui prône une baisse drastique des impôts accompagnée d’une baisse des dépenses publiques. « Les belles théories économiques sortant d’esprits aussi brillants soient-ils, trouvent leur limite face à des familles qui n’ont que quelques milliers de francs par mois pour vivre » estime le président vantant à l’inverse la politique de « redistribution » qui serait mise en place par le gouvernement au travers des diverses mesures de soutien social. L’ancien ministre des finances n’en démord pourtant pas : « la solution que propose le président ce sont les vielles recettes, le FRPH – pour bloquer le prix des hydrocarbures – , les PPN, c’est-à-dire plafonner les prix en augmentant les impôts. Il faut complètement changer de logiciel économique » bien entendu pour l’élu de l’opposition. « Le président lui a été habitué toute sa vie politique à ce logiciel politique » souligne-t-il.

Au vu des scores aux législatives, c’est pourtant le Tavini qui se place comme le grand adversaire du Tapura dans les échéances électorales à venir. Comme il l’avait fait depuis les Raromatai, à l’annonce de l’avis positif du Conseil d’État sur son troisième mandat, Édouard Fritch s’attaque donc, toujours dans le discours d’ouverture, au projet indépendantiste des bleu ciel. « C’est l’intervention de l’État qui a été déterminante pour la sauvegarde des emplois et de la protection sociale généralisée, pas celle de l’Onu » rappelle-t-il. Là non plus, pas de quoi perturber Tony Géros, président du groupe Tavini, pour qui ce débat budgétaire est quoiqu’il arrive limité par les compétences exercées par l’État et les décisions qui sont prises pour la Polynésie à Paris. « Le développement économique souhaité n’a jamais été atteint sous les différents gouvernements qui se sont succédé en 40 ans, tant qu’on restera dans le système jamais on ne pourra décoller» pour l’ancien président de l’assemblée.

« Rob de Halloween » et « petit jeunot mal élevé »

Teva Rohfritsch, lui non plus, ne mâchera pas ses mots sur la politique du gouvernement et du parti qu’il a quitté voilà un mois et demi. Le sénateur et représentant non-inscrit liste une série d’incohérences du rapport d’orientation budgétaire (ROB) qu’il présente comme décousu, incomplet, sans vision et souvent pas en phase avec le discours du gouvernement. « J’espère que vous l’avez lu monsieur le président », lance-t-il à son ancien chef de file du Tapura. « C’est le Rob de Halloween. Nous sommes plongés dans l’obscurité après l’avoir lu ». Édouard Fritch lui répondra plus tard, en filant lui aussi la métaphore d’Halloween. « Vous aimez faire peur aux gens, vous aimez vous déguiser aussi. En donneur de leçon un jour, en démagogue, mais toujours avec le même masque et le même maquillage, celui de la politique politicienne » déclare le président sur un ton glacial. Avant d’accuser son ancien ministre des Finances de « petit jeunot mal élevé », coupable « d’offense », de seulement chercher à « faire du bruit », à « draguer » d’autres élus de l’assemblée, et à « salir » l’exécutif.

Et pourtant, « Vous avez décidé d’être en face de nous après que vous aillez obtenu tous les bonbons possibles pour un élu » note Édouard Fritch qui prend soin de rappeler « l’échec cinglant » de son interlocuteur aux municipales de Punaauia » et les efforts pour le « sortir de la boue » sans lesquels il n’aurait « même pas été élu sénateur Tapura ». « Vous ne pesiez pas grand-chose, sinon par le poids que vous représentez », insiste Édouard Fritch. Des attaques personnelles dénoncées dans les rangs de l’opposition, mais face auxquelles Teva Rohfritsch n’aura que peu l’occasion de se défendre malgré le soutien de Nicole Sanquer. Intervenant plus tard sur le contrat de ville, le sénateur se fera couper le micro par le président de l’assemblée quand il « déviera trop » du sujet au goût du président de l’assemblée. Une situation que Teva Rohfritch juge inacceptable au vu « du droit d’un élu à répondre à des attaques personnelles selon le règlement de l’APF ». Il conclura : « au Tapura il faut écouter et se taire, mais nous ne nous tairons pas ». Teva Rohfritch met en garde ses anciens partenaires politiques, en leur intimant qu’il « sera là pour débattre de chaque ligne du budget même si ses questions dérangent ».

Les acteurs du tourisme dans une « inquiétude importante » face aux proposition de loi d’Antonio Perez

Et parmi les sujets discutés ce matin ces deux propositions de loi déposées par l’élu Tapura Antonio Perez concernant la fiscalité du tourisme. Ils n’ont pas encore été étudiés à Tarahoi, mais les deux textes, repérés ce matin par Tahiti infos, pourraient être votés d’ici la fin de l’année et largement alourdir les taxes payées par les touristes extérieurs. La première proposition propose en effet de donner la possibilité aux communes de créer des centimes additionnels adossés à redevance de promotion touristique déjà payée au Pays, pour chaque client dans les chambres d’hôtels et cabines de bateaux. Des centimes qui pourraient atteindre 50% de ladite redevance, elle-même estimée à plus d’un milliard de francs par an. Deuxième texte et deuxième taxe qui pourrait s’envoler : la taxe de séjour, déjà prélevée par les communes pour financer les frais entourant l’activité touristique. Les montant maximum de cette taxe, qui différé suivant les types d’établissement, seraient revu largement à la hausse, permettant aux communes de doubler, voire de multiplier par cinq leur rendement. Des propositions faites « sans concertation préalable ni travaux avec l’industrie », a rappelé l’ancienne ministre du tourisme et démissionnaire du Tapura Nicole bouteau qui parle d’une « inquiétude importante » pour les acteurs du tourisme qui, accords commerciaux obligent, vont être obligés d’absorber les éventuelles hausses de taxe. Ni le gouvernement, sans l’accord duquel ces textes « ne seraient pas déposés » ni le porteur du texte Antonio Perez n’a répondu, mais le débat promet d’être relevé sur ce sujet dans les semaines à venir.

Teva Rohfritch a été la cible de remarques très ciblées du président du Pays lors de la séance de ce lundi. ©MB/Radio1

Tony Géros, président du groupe Tavini à l’assemblée. ©MB/Radio1

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