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Médecine traditionnelle : « Il y a une demande forte et on est prêt à y répondre »

Le Pays prépare, avec des professionnels de Santé, des agriculteurs et des tradipraticiens, un nouveau cadre juridique pour les plantes médicinales et leur utilisation. « Il faut que l’on fasse converger dans nos structures de santé officielles la médecine conventionnelle et cette science patrimoniale » a insisté le ministre Tearii Alpha. Édouard Fritch a demandé des résultats avant 2023.

Poser les bases d’une « médecine intégrative ». C’est l’objectif affiché par le Pays lors d’un séminaire sur la valorisation des plantes aromatiques, cosmétiques et médicinales, qui a eu lieu vendredi. La « médecine intégrative », c’est l’idée de faire une place, dans les structures de santé conventionnelles, à des techniques, des remèdes et des praticiens de médecine traditionnelle. Le sujet n’est pas neuf, les expériences ont été nombreuses mais cette fois, les autorités veulent « concrétiser ». Édouard Fritch, qui ouvrait le séminaire, a ainsi appuyé l’idée que la valorisation des « ra’au tahiti » présentait plus que jamais des enjeux économiques, sociaux, culturels et sanitaires… Et peut-être politique, la crise sanitaire ayant redonné vigueur à certains discours sur l’intérêt de la médecine traditionnelle. Objectif fixé par le président, devant un parterre de chefs d’administrations, de professionnels de santé et de spécialiste de la médecine traditionnelle ou de l’agriculture : aboutir à un cadre juridique « novateur » et opérationnel avant la fin de la mandature, en 2023.

Codifier les pratiques, agréer les praticiens

À ses côtés Tearii Alpha, qui n’est plus vice-président mais qui est toujours ministre de l’Agriculture, en charge notamment de la recherche. Discret sur sa « rétrogradation » récente, sur sa non-vaccination, et sur les tensions politiques du moment, il s’est en revanche montré très loquace sur ce chantier. « Il s’agit de faire converger dans nos structures de santé la médecine conventionnelle et ce savoir traditionnelle, cette science patrimoniale », a-t-il insisté, prenant soin de ne jamais opposer les pratiques. Les grandes lignes des travaux à mener ont été définies au travers d’une série d’ateliers vendredi. Une commission spéciale devrait être formée pour avancer sur le cadre règlementaire, qui a déjà fait l’objet d’une ébauche commandée par le pays à une juriste spécialisée. Il s’agira aussi de créer une liste officielle de plantes à « valeur médicinale » et de formaliser leurs usages ou leur toxicité. L’idée est de « codifier les pratiques », donc, mais aussi de donner un statut aux praticiens. Le deuxième objectif est donc de créer un système d’agréments qui, en s’appuyant sur les structures associatives existantes, pourraient être accordés aux tradipraticiens, « qui, trop souvent, travaillent aujourd’hui dans l’ombre ». Ces derniers interviendront quoiqu’il arrive « en collaboration et sous la responsabilité des médecins, dans le cadre des centres de santé » reprend le ministre. « Le troisième objectif, c’est de valoriser différents remèdes, plus ou moins connus, validés par les médecins qui vont être les garants de leur utilisation » ajoute-t-il.

« Nous sommes prêts »

Les travaux entre médecins et tenants de la médecine traditionnelle ne sont pas neufs, « ils ont été entamés il y a plus de 20 ans avec l’association Haururu », comme le rappellent plusieurs professionnels de santé présents au séminaire. Depuis 2017, des tradipraticiens sont même entrés au CHPF, notamment pour pratiquer des massages, des appositions de main et « soigner la spiritualité » de certains patients. Des expérimentations ciblées sont aussi menées à l’hôpital de Taravao, Moorea ou Raiatea et la Polynésie a déjà publié plusieurs études sur ces débuts de médecine intégrative dans les revues spécialisées en santé ou en sciences sociales. « Il y a une demande forte de la population et on est prêt à aller plus loin pour y répondre » explique le Dr Éric Parrat, chef du service pneumologie du Taaone et président d’une association rassemblant des professionnels de santé prêts à « franchir le pas ».

Lors du séminaire, des représentants de la direction de la Santé et du ministère, plus discret, ont aussi exprimé un intérêt pour ces travaux. Mais pas question de sauter les étapes : l’utilisation de la pharmacopée traditionnelle doit faire l’objet de recherches systématiques, et « la sécurité des pratiques et des patients » reste la priorité majeure. « Nous ne sommes pas là pour faire porter aux tradipraticiens des responsabilités qu’ils n’ont pas, reprend Éric Parrat. On doit travailler ensemble, chacun à sa place, dans une équipe de soin où le médecin conserve la responsabilité ».

Premier rendez-vous de ce chantier, une grande réunion des tradipraticiens qui devrait se tenir à l’Université le 11 décembre prochain.

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1 Commentaire

  1. simone Grand
    8 novembre 2021 à 7h04 — Répondre

    Commençons donc par définir les mots utilisés.

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