ACTUS LOCALESPOLITIQUE

Oscar Temaru a « dit à Moetai de faire très attention »


Oscar Temaru
a profité d’une conférence de presse ce matin, pour railler l’union autonomiste, réaffirmer la légitimité du travail du Tavini avec l’Azerbaïdjan, remettre sur la table le projet d’exploitation des richesses minières des fonds marins… Et surtout remettre en lumière ses divergences avec le président du Pays, accusé, en substance, d’être trop tendre avec Paris et de ne pas appliquer le programme du parti.

Lire aussi : Chez les autonomistes, on a tous nos ambitions et nos égos, c’est ça le problème »

C’est dans son nouveau QG flambant neuf, adjacent à sa mairie, qu’Oscar Temaru convie la presse ce lundi. Une conférence organisée à la dernière minute, en réaction à l’actualité récente. Et comme souvent, le président du Tavini vogue d’un sujet à l’autre, non sans glisser quelques tacles. Aux autonomistes pour commencer. Le maire de Faa’a a cité la couverture médiatique réalisée samedi, autour de la journée de cohésion de la plateforme Amui Tatou. « Quand j’ai vu ça, je me suis dit ‘personne n’a rien compris’, ni les journalistes, ni les hommes politiques », glisse-t-il, soulignant au passage avoir « surtout remarqué que Gaston n’y était pas ».

« Tepuaraurii Teriitahi parle d’union, d’union et d’union, mais pourquoi faire ? Retourner aux affaires du pays ? Vous y avez été pendant cinquante ans. Le statut d’autonomie date de 1977, et on remarque la mainmise de l’État. On a l’impression que c’est faire l’union pour l’union, pour gagner les élections, c’est tout », poursuit le maire de Faa’a. Fidèle à lui-même, il a martelé « que nous ne pouvons pas continuer comme ça, ce n’est pas possible, ce n’est pas l’outil qu’il nous faut pour gérer ce grand pays ». Avant de faire rouler entre ses doigts deux sphères noires rapportées des îles Cook : les fameux nodules polymétalliques, dont il fait la promotion depuis quarante ans pour financer l’indépendance. Citant aussi l’aquaculture intensive, en prenant l’exemple des élevages de poulpes aux Japon, ils souligne que « ce pays a des ressources extraordinaires : il ne devrait plus y avoir de pauvre et c’est ça le combat à mener », insiste-t-il.

« Le chemin qu’emprunte Moetai, d’autres l’ont déjà fait, il ne faut pas oublier où cela nous a mené »

Un sujet – l’exploitation minière des grands fonds – sur lequel le tavana de Faa’a regrette que Moetai Brotherson « partage le même avis que Macron » sur la question, à savoir une opinion défavorable. Et ce n’est pas la seule dissonance qu’Oscar Temaru a relève avec son gendre de président. À la question « le programme du Tavini est il appliqué ? », il répond « Non, ils ne peuvent pas ». Alors que le président du Pays expliqué répondu qu’une clarification de la ligne du Tavini était nécessaire, au soir de la défaite aux Législatives de juin 2024, Oscar Temaru maintient : « on sait ce que l’on veut, on a un programme, notre objectif est la majorité absolue ». Aussi bien pour les municipales de 2026, que pour d’éventuelles législatives cette année, si Emmanuel Macron venait à nouveau dissoudre l’Assemblée nationale. Une hypothèse anticipée par le président du parti, mais qui vaudra sans doute aux deux intéressés des discussions animées, notamment lors d’un séminaire du parti en février, suivi d’un congrès en mars, à l’issue desquels les candidats bleu ciel pour les municipales seront annoncés.

Reste à savoir quelle ligne politique le Tavini présentera sur les listes électorales. « Le soir de son départ à Paris, je suis allé l’accompagner à l’aéroport, pour lui dire de faire très attention. Le chemin qu’il emprunte, d’autres l’ont déjà fait, il ne faut pas oublier où cela nous a mené aujourd’hui », relate l’élu indépendantiste. Pour développer son propos, « c’est facile, il n’y a qu’à faire des comparaisons : regardez à côté (aux îles Cook), ils n’ont plus ce statut d’autonomie, et il sont en train d’exploiter (les fonds marins). Chez nous, c’est la France qui donne son avis à l’ISA (autorité internationale des fonds marins), et nous n’avons pas le droit de le faire, c’est ça la réalité », poursuit-il, visiblement peu en phase avec le positionnement du gouvernement qu’il aimerait être plus incisif avec l’État.

Il est aussi à noter qu’aucun pays du Pacifique ne mène actuellement d’exploitation commerciale des nodules polymétalliques, et que plusieurs états indépendants de la zone s’opposent au projet pour des raisons environnementales.

Moetai, indépendantiste, mais…

Au vu des divergences affichées ici et là, Moetai Brotherson était-il le plus indiqué au Tavini pour briguer la présidence du pays, quand Tony Géros, plus proche de la ligne Temaru, briguait aussi le siège ? « On ne peut pas tout avoir dans la vie », sourit Oscar Temaru. « L’objectif premier, c’était d’empêcher qu’Edouard Fritch soit réélu président. Car sa première mission aurait été d’aller à New York pour retirer notre pays de la liste des territoires à décoloniser », répond Oscar Temaru. Avant d’observer un silence et de lancer que « l’attitude de Moetai est l’attitude de plusieurs personnes de chez nous, des gens qui sont pour l’indépendance mais qui prennent le temps de, de, de… ».

Le président du Pays s’est par exemple souvent montré réservé, sans jamais les renier, au sujet des liens tissés entre le  Tavini et Groupe d’Initiative de Bakou (GIB), une ONG d’Azerbaidjan, pays en froid avec la France, qui multiplie les provocations envers Paris. Un groupe qui a récemment soutenu la création du « Front international de décolonisation » lancé à Nouméa par différents parti indépendantistes de territoires français, dont le Tavini. Interrogé sur la question dimanche soir par Polynésie la 1re, Moetai Brotherson avait renvoyé, une nouvelle fois, vers « les dirigeants du parti ». « Ce n’est pas l’Azerbaïdjan. Aujourd’hui ce pays représente surtout les 145 pays membres des non-alignés. Il parle au nom de tous ces pays là », dit Oscar Temaru. Un sujet bien vite éludé, quand bien même il figurait en tête de l’ordre du jour.

Article précedent

Face aux coupes budgétaires d'État, le Pays menace de "renoncer" à Tahiti 2027

Article suivant

Jt Vert 28/01/2025

Aucun Commentaire

Laisser un commentaire

PARTAGER

Oscar Temaru a « dit à Moetai de faire très attention »