ACTUS LOCALESSOCIAL

Patrick Galenon veut aller « titiller » les « entreprises pas prêtes à redistribuer aux salariés »

Invité de la rédaction de Radio1 ce mardi, Patrick Galenon a expliqué que les entreprises qui « gagnent de l’argent » devaient se préparer à négocier à la hausse les salaires dans le contexte actuel d’inflation. Le secrétaire général de la CSTP-FO, qui pourrait être candidat à sa succession en février, est aussi revenu sur la question de l’emploi local, sujet sur lequel l’État ne « joue pas le jeu ». Ou sur le remboursement du coût des maladies radio-induites à la CPS, qui selon lui « n’avance pas ».

6,9% d’augmentation des prix sur 12 mois glissants, 7,1% pour les seuls produits alimentaires, et des étiquettes qui continuent de grimper. Pour Patrick Galenon, pas de changement de discours : les salaires doivent suivre l’inflation galopante. À commencer par le Smig. Son organisation, la CSTP-FO avait déjà, comme d’autres, déposé un recours contre la revalorisation de 2% du salaire minimum actée au 1er mai par le gouvernement. Trop peu par rapport aux chiffres de l’indice des prix à la consommation, précise-t-il. La procédure « suit son cours », et devrait « ne pas tarder à aboutir », explique le secrétaire général, qui est déjà tourné vers la suite. Des négociations doivent avoir lieu, à partir de début octobre, avec le gouvernement, et surtout, les syndicats comptent bien peser dans les négociations de branche ou d’entreprises d’ici la fin de l’année.

« Ça a commencé, on a des propositions très intéressantes, par exemple au niveau de l’Unimap des acconiers, on en discute chez Air France… », reprend le responsable. Pour les autres il faut « s’attendre à négocier ». Et tant pis si beaucoup interpellent sur l’effet boule de neige des augmentations de salaires en période d’inflation : « Les patrons voient toujours le risque de faire moins de bénéfices et de pognon pour eux », ironise le conseiller au Cesec. Il convient tout de même que beaucoup de sociétés ne se sont pas pleinement remises de la crise Covid, et assure que les syndicats ne cherchent pas à créer de tensions injustifiées. « Si une entreprise est vraiment en difficulté, on essaie de patienter un peu, mais on sait que certaines entreprises gagnent beaucoup d’argent et ne sont pas prêtes à redistribuer aux salariés. C’est celles-là que nous voulons titiller. »

La prime défiscalisée, oui, mais les augmentations de salaire aussi

Le patronat avait déjà formulé des propositions de réaction à l’inflation. Notamment du côté du Medef et de son président, Frédéric Dock, qui avait proposé au gouvernement dès la fin juillet d’autoriser pour la fin de l’année une prime exonérée de fiscalité, de charges patronales et salariales. Une idée qui concernerait surtout les plus petits salaires et que le ministre des Finances Yvonnick Raffin avait positivement accueillie. Rien, pourtant, n’a été acté pour l’instant, et les négociations sur le fonctionnement ou le montant de ces primes n’ont pas commencé. Patrick Galenon émet déjà des doutes sur le dispositif : défiscaliser, exonérer, c’est priver le Pays et la CPS de rentrées d’argent. « S’ils nous donnent une prime, il ne faut pas la refuser, et j’espère qu’elle sera consistante », nuance le chef de file de Force Ouvrière en Polynésie, mais pas question qu’elle remplace les hausses de salaires : « l’augmentation de salaire, elle est perpétuelle. »

Nucléaire : le Pays ne porte pas « suffisamment » la demande de remboursement

Si Patrick Galenon porte une attention particulière aux cotisations sociales, c’est qu’il est aussi président du Conseil d’administration de la CPS. Une caisse qui a beaucoup subi la période Covid, avec les baisses de recettes ou l’explosion des arrêts maladies – jusqu’à 18 000 par mois contre 6 000 habituellement. Aujourd’hui « ça va mieux », explique-t-il, entre autres grâce à la TVA sociale mise en place pour fournir l’amortisseur financier nécessaire à la PSG le temps de mener des réformes de fond. La taxe a engendré « des grosses entrées » d’argent, explique-t-il. Et s’il ne l’a pas contestée, elle aurait pu, selon lui, être évitée si le dossier du remboursement des maladies radio-induites avait avancé. Un cheval de bataille pour le syndicaliste, qui chiffrait il y a déjà trois ans à 90 milliards le coût supporté par la CPS pour traiter les cancers potentiellement engendrés par les essais nucléaires. À l’entendre, le sujet du remboursement de ces dépenses par Paris « n’avance absolument pas ». Parce que « le territoire n’a pas porté la demande suffisamment loin », et parce que l’État fait preuve de mauvaise volonté, assure-t-il. Les échanges sur le chiffrage exact de ces dépenses seraient ainsi un faux débat : « Nous on a des chiffres, peut-être qu’ils sont faux, ils sont certainement incomplets, reconnait-il. Mais quand je pose la question aux grands spécialistes de l’État, (…) et bien non, ils n’ont pas de chiffres. Et bien s’ils n’en n’ont pas, on tient compte des miens ».

Quant à la réforme de la PSG, elle prend son temps. Car outre la fusion des régimes, idée déjà actée dans la loi, c’est le Comité stratégique de la protection sociale universelle qui doit définir les grandes lignes de la réforme. Et s’il n’est pas encore mis en place, c’est qu’on se dispute en coulisse sur la répartition des 50 sièges. « Moi j’ai le mien, je me bats plus« , sourit Patrick Galenon. Mais le syndicaliste estime qu’il y a un problème « d’objectifs » chez certains : « Ceux qui veulent avoir les postes n’ont pas une stratégie bien établie » pour le sauvetage de la PSG, pointe-t-il. La réforme de la PSG, prévient le patron de FO, reste un sujet qui peut finir, comme la réforme des retraites en 2018 ou celle de la gouvernance de la CPS en 2021, dans la rue. Patrick Galenon sera peut-être là pour animer le débat : son syndicat doit tenir un congrès à la fin du mois de février, et il n’exclut pas d’être candidat à sa succession : « Si les adhérents sont contents de moi, ils vont me le demander ». Quant aux territoriales, le syndicaliste, qui avait un temps envisagé de se présenter aux législatives, est courtisé, mais « ne sera pas candidat ».

La suppression de l’indemnité d’éloignement, une idée « ridicule »

C’est un autre sujet sur lequel Paris ne jouerait « pas le jeu ». L’emploi local dans la fonction publique d’État anime de plus en plus fréquemment l’actualité. Douaniers, policiers ou plus récemment greffiers… Les accrocs s’enchainent et la CSTP-FO regrette de ne pas être entendue sur le sujet. Pour le syndicat, l’important est de favoriser au maximum le retour des fonctionnaires d’État polynésiens partis se former ou débuter leur carrière en France. Or beaucoup de demandes seraient refusées à cause de la définition « complexe » du CIMM – le centre d’intérêts matériels et moraux – et l’application « pas claire » des textes par l’administration centrale. Aussi, FO a proposé de simplifier les choses : 15 ans de résidence dans la collectivité doivent permettre de prouver son attachement, et donc de motiver sa demande de retour. Et des retours, Patrick Galenon dit n’en avoir eu aucun malgré les interpellations de ministres ou de Haussaires sur la question.

Cette idée, son syndicat l’a une fois de plus mise sur la table, du Pays cette fois, lors de la rencontre avec Lana Tetuanui à la présidence la semaine dernière. La sénatrice a déposé une proposition de loi visant à supprimer l’indemnité d’éloignement des fonctionnaires d’État en Polynésie, pour rendre la destination moins attractive financièrement et donc faire de la place pour les Polynésiens. « Une très mauvaise idée », répète Patrick Galenon. « Pourquoi aller supprimer les droits de ceux qui viennent en Polynésie, les spécialistes, les profs d’université, on en a besoin, explique-t-il. Le problème, c’est pas leurs droits, c’est de faire admettre que les Polynésiens ont les mêmes droits quand ils vont en France ». D’après lui cette prime d’origine ancienne – cinq mois de traitement pour chaque période de deux ans, qui s’ajoutent ensuite à l’indexation des salaires – se justifie « toujours » et permet d’insuffler « une dizaine de milliards de francs » dans l’économie locale, taxés à hauteur de « 1,2 milliards » au profit de la CPS. « Ça fait beaucoup d’argent, mais madame la sénatrice n’a pas calculé comme ça, elle s’est juste dit : ‘ces petits Français qui viennent en Polynésie, il ne faut plus qu’ils viennent’, reprend-t-il. C’est ridicule. Ce qu’on veut c’est que les petits Polynésiens aient les mêmes droits ».

« Écouté » à la présidence, Patrick Galenon « attend de voir » si Lana Tetuanui fait évoluer son texte. Et attend aussi, au passage, l’application de la loi sur l’emploi local, demandé de longue date, mais qui serait, dans sa forme actuelle, « une usine à gaz ». En attendant, il le prédit : l’emploi local va prendre une place très importante dans le débat politique des territoriales. « Ça a déjà été le sujet majeur des dernières élections avec le pouvoir d’achat et les maladies radio-induites, et c’est pour ça qu’il y a eu 3 – 0 ».

 

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