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Thonier échoué à Arutua : après l’échec des premiers travaux, quel plan ?

©FB

Le thonier chinois échoué à Arutua le 21 mars dernier est toujours sur le récif, apparemment en plus mauvais état qu’il ne l’était avant les premières interventions de dépollution et de déséchouage, mandatées par l’armateur, qui ont été un échec. Avec la saison fraîche du maraamu, la houle qui a déjà emporté le barrage anti-pollution, fait craindre « une catastrophe écologique » aux habitants de l’atoll, qui vivent de pêche et de perliculture. Le maire de la commune affirme que pour l’instant aucun dommage majeur n’est relevé, mais demande l’intervention du Pays. Une nouvelle tentative est prévue pour le 12 juillet.

Plus de trois mois après l’accident le Shen Gang Shun 1 endommage chaque jour un peu plus le lagon d’Arutua, selon certains habitants. Ceux qui exploitent notamment la perle, les trocas et les bénitiers craignent pour leur lieu de vie et de travail. La secrétaire adjointe de l’association A Paruru Anae ite Arutaimareva no Arutua donne sa version dans une vidéo publiée sur Facebook.

De son côté, le maire de la commune, Reupena Taputuarai, réfute ces déclarations. Il affirme que le lagon n’est pas endommagé, et que le gardien qui est sur le site n’a signalé aucune trace de mazout.  Les traînées noires visibles sur les photos sont, dit-il, « des algues qui ont poussé entretemps. D’ailleurs un agent de l’Environnement est venu prendre des échantillons de chaque espèce, et j’attends les résultats. »  Et concernant les coquillages, il s’inscrit en faux : « ce qu’ils ont ramassé, ce sont les bénitiers et les maua que nous avons mangés sur place et jeté les coquilles. Ils ne sont pas contaminés du tout, là j’assume ce que je dis »,  photo à l’appui.

©Reupena Taputuarai

Il affirme aussi être en possession d’un document de la compagnie d’assurances du navire certifiant qu’il n’y a plus de gazole à bord, mais confirme que « les carcasses de poisson se trouvent toujours à l’intérieur du bateau ». 

Une situation qui inquiète aussi Raimana Maout, pêcheur professionnel :

Le barrage anti-pollution emporté par la houle

Le barrage flottant anti-pollution de plus de 400 mètres installé fin avril par le Pays n’a pas fonctionné. Emporté par la houle, il a été remis en place une première fois, mais « hier le gardien embauché par l’assurance du bateau est passé sur le site et a bien confirmé que le barrage n’existe plus à cause de la forte houle ces temps-ci » , dit le maire. De toute façon, les spécialistes des travaux maritimes estiment risible l’idée que ce barrage flottant puisse être « essoré » de l’eau souillée qui aurait été ensuite récupérée : « ces trucs-là, ça se récupère et ça se jette, ça ne s’essore pas. » 

Un plan de sauvetage raté, sur lequel le Pays avait émis des réserves

Le Tahiti Nui VIII de la flotille administrative et le remorqueur Aito, partis de Papeete le 8 mai dernier, affrétés par la société Travaux maritimes de Polynésie (TMP, du groupe Boyer) pour le compte du propriétaire, n’ont pas pu mener leur mission à bien. Le Pays avait d’ailleurs émis des réserves sur ce plan. Seul un tiers de la cargaison a pu être sortie du Shen Gang Shun 1, d’après la Direction polynésienne des affaires maritimes (DPAM). Si une partie des huiles a pu être transférée dans des cubitainers et transbordée sur le navire de la flottille administrative, le positionnement des deux navires n’a pas permis à la grue du Tahiti Nui VIII d’atteindre les « big bags » remplis par les agents de la TSP de poisson et d’appâts en putréfaction pour les évacuer. Et du carburant est toujours à bord du thonier, notamment dans les nombreux réservoirs annexes dissimulés, très compliqués à atteindre.

La mission n’est pas parvenue à déséchouer le navire, en partie parce qu’il n’était donc pas suffisamment allégé. Pire, l’effort pour tracter le thonier hors du platier vers l’océan a légèrement bougé le thonier, et aurait ouvert ou agrandi une brèche dans la coque, augmentant le risque de pollution ; le navire qui était planté droit dans une faille du récif montre à présent une gîte à bâbord.

Le maire de Arutua l’affirme : ces traces noires sont des algues qui sont en cours d’analyse par la Diren. ©FB

Une dépollution et un démantèlement par la terre, comme à Marutea Nord ? 

Un spécialiste de la dépollution, basé à Singapour, aurait été contacté pour envisager de dépolluer le navire par le lagon et non par la mer, où la houle qui forcit rend les opérations plus difficiles et plus dangereuses. Mais son devis aurait été jugé trop cher par le propriétaire du thonier. Une nouvelle tentative, dit le tavana de l’atoll qui a été en contact avec le ministre Jean-Christophe Bouissou, serait prévue pour le 12 juillet.

Si le retrait du thonier par la mer n’est pas possible, il faudra alors le démanteler sur place, une opération longue, difficile et coûteuse puisque Arutua ne possède qu’une passe peu profonde et pas de quai pour de grandes unités.  Mais il faudra de toute façon dépolluer le navire échoué avant de le découper.

Rappelons que le 30 avril, le tribunal administratif saisi par le Pays avait prononcé une astreinte de 500 000 Fcfp par jour de retard sur la dépollution et une autre astreinte du même montant par jour de retard sur l’enlèvement du navire.

À Arutua, l’inquiétude persiste sur ces opérations. « Je demande encore au pays de faire le nécessaire que ce bateau soit vite retiré du récif de Arutua, » disait ce matin tavana Reupena Tapuatarai.

 

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