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Adoption hors procédure : les deux couples relaxés en appel

@Florent Collet / Radio 1

Deux couples étaient jugés pour avoir organisé, avant sa naissance, l’adoption d’un bébé en contournant les règles en la matière. Un des deux pères adoptifs avait notamment déclaré l’enfant à son nom auprès de l’état-civil. La cour d’appel a toutefois considéré, comme en première instance, qu’il n’y avait eu ni soustraction d’enfant, ni incitation à l’abandon, ni obtention frauduleuse de document.

Larmes de soulagement, au palais de justice, dans une affaire qui a beaucoup fait parler ces derniers mois. Deux couples étaient poursuivis pour avoir organisé entre eux l’adoption d’une petite fille née en octobre 2020 dans une clinique de Papeete. Les parents adoptifs, deux hommes métropolitains installés depuis plus de trois ans au fenua, avaient entendu parler par une amie des parents biologiques, habitant Tahiti. La jeune mère avait déjà confié ses deux premiers enfants par le passé et, dans le dernier terme de sa grossesse, cherchait à confier le troisième. Deux semaines avant l’accouchement, le couple, passé par plusieurs tentatives malheureuses d’adoption via les circuits officiels, rencontre la jeune femme et trouve un accord en dehors de tout cadre légal.

Avec l’accord de la mère, l’un des deux pères adoptifs fait une reconnaissance préalable de paternité, assiste à l’accouchement, et se désigne de nouveau comme le père biologique auprès de l’état-civil après la naissance. Un signalement de la DSFE amènera le parquet à ouvrir une enquête, à perquisitionner en novembre le domicile du couple, et à placer l’enfant auprès des services sociaux. En février, pourtant, le tribunal correctionnel avait prononcé la relaxe pour les deux couples. Une décision dont le parquet avait fait appel, dans l’espoir de faire appliquer, au travers de cette affaire, une nouvelle ligne plus stricte vis-à-vis des « dérives » de l’adoption fa’a’amu.

« Le commerce d’enfant est une pratique bien sûr inacceptable »

La cour d’appel a pourtant confirmé cette relaxe ce matin, dans une décision, encore une fois, particulièrement argumentée. La présidente du tribunal a ainsi rappelé que « le commerce d’enfant est une pratique bien sûr inacceptable », et qui n’a « rien à voir » avec la pratique traditionnelle du fa’a’amu en Polynésie. Avant de décortiquer chaque chef d’accusation et d’expliquer pourquoi ils avaient été, en l’espèce, écartés. À commencer par le délit de soustraction d’enfant, non constitué puisque les adoptants n’ont à aucun moment agi contre la décision des parents biologiques, qui avait d’ailleurs décidé de confier leur enfant avant leur rencontre. Pour l’avocat du couple qui a adopté, Me Bennouar, il s’agit avant tout de la reconnaissance que cette adoption a été faite « dans l’intérêt » de la petite fille adoptée.

« Aucune promesse, si ce n’est celle de lui prodiguer une vie meilleure »

Concernant la fausse déclaration de paternité, le tribunal, comme en première instance, a considéré qu’il s’agissait d’une « reconnaissance de complaisance », là encore « dans l’intérêt de l’enfant », plus qu’un acte frauduleux. Enfin, le délit d’incitation à l’abandon n’a pas été retenu puisque le couple d’adoptants n’a formulé « aucune promesse, si ce n’est celle de prodiguer une vie meilleure » à l’enfant. Les parents biologiques avaient bien reçu, quelque temps après l’accouchement, de l’argent pour des frais de santé de la mère et des besoins matériels de la famille. Mais ces 114 000 francs n’étaient « pas promis » et qui ne peuvent « en aucun cas » être considérée comme le « prix » du bébé polynésien, a pointé la présidente du tribunal. « Ils ont adhéré à une famille » et ont donc fait jouer les devoirs « d’humanité » et de « solidarité », explique l’avocat du couple.

L’affaire n’est toutefois pas terminée : la petite fille a été placée dans les services sociaux, et les parents adoptants sont en attente d’une décision du juge des enfants pour la récupérer.

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