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Cour d’assises : de proie à prédateur

Ce mercredi un homme de 38 ans comparaissait devant la cour d’assises pour viol sur mineure. Particularité de l’accusé, lui-même avait subi des viols, de 9 à 16 ans, de la part d’un homme qui purge actuellement une peine de 20 ans de réclusion.

« (….) N’écoutez ni la haine, ni l’affection, mais seulement votre intime conviction. Dites je le jure.»,  prévient la présidente de la cour d’assises, s’adressant aux jurés. Le moment est solennel, lourd de sens car le bon déroulé du procès en dépend, et il en va de l’avenir d’un homme et de sa victime.

L’homme au banc des accusés encourt vingt années de réclusion pour viol sur mineure. Il est assis, le regard dirigé vers le sol. « Accusé, levez-vous. » Il met un certain temps avant de sortir de sa torpeur. Longiligne, le visage émacié et les cheveux grisonnants, il se lève. Il reste immobile, tête baissée, les mains croisés comme s’il priait et de temps à autre, les muscles de son visage se crispent. Il écoute les faits qui lui sont reprochés. Et ceux-ci sont lourds. On l’accuse d’avoir, de 2006 à 2012, contraint sexuellement une fillette âgée de 9 ans au début des fait, jusqu’à ce que la victime porte plainte. Lors des débats on apprendra qu’en 1993, alors qu’il était âgé de 12 ans et lui-même victime de viols à répétition, il s’en était également pris à la sœur de la victime.

Il se fait le protecteur de sa future victime

En 2006, alors qu’il est âgé de 25 ans, l’homme surprend un homme agressant sexuellement la petite fille, sa future victime. Il menace l’homme de représailles et devient alors le « protecteur » de la fillette. Mais au fil du temps, il devient pressant et lui impose une fellation alors qu’elle atteint sa dixième année.

Soufflant le chaud et froid, c’est à force de cadeaux ou de menaces de tout révéler au voisinage qu’il soumet sa victime à ses pulsions. Un peu plus tard, alors que la gamine à un petit copain, il lui dit que pour garder son flirt, il faut qu’elle devienne « une pro au lit » et qu’il fallait coucher avec lui pour le devenir. Elle se refuse à lui, mais à force d’insister, il parvient à ses fins. Au bout d’un temps la victime, n’en pouvant plus, se confie à ses parents et va porter plainte à la DSP en 2012. Elle a 15 ans.

Durant son contrôle judicaire il fait d’autres victimes

Aussitôt placé en garde à vue, il minimise les faits, disant qu’il était tombé amoureux d’elle et qu’ils avaient une relation de couple. Il est remis en liberté, sous contrôle judiciaire, le temps que l’enquête s’effectue.

En 2014, alors qu’une procédure est déposée au parquet où l’on demande son incarcération en attendant son procès, le juge des libertés et de la détention estime que le contrôle judiciaire est suffisant. Ce que le juge n’avait pas vu venir, c’est que durant son contrôle judiciaire, il fera trois nouvelles victimes. Ces faits révélés en 2019 lui valent d’être actuellement en détention provisoire. Il sera jugé prochainement pour ces affaires.

Il tente plusieurs fois de mettre fin à ses jours 

À la demande de la présidente de la cour d’assises, l’homme évoque son enfance. Avant les viols qu’il a subis à l’âge de 9 ans et durant 7 ans de la part d’un entraîneur de boxe, il avait une enfance sans histoire, heureuse. Il éclate en sanglots à l’évocation de ses frères et sœur, « C’est à cause de moi que mon petit frère est devenu Cotorep (…). J’ai été très méchant en paroles et je le battais. » Quant à ses parents, ils le battaient. « Baffes, ceinture, balai niau, style belle époque » explique-t-il.

Il avouera aussi avoir fait plusieurs tentatives de suicide, rongé par le remords. La dernière, c’était en garde à vue en mai 2019. À bout, c’est là qu’il révélera avoir fait d’autres victimes. « Le mal que j’ai fait, ça m’a beaucoup touché », expliquera-t-il.

« J’assume ce que j’ai fait, je n’ai pas d’excuse. »

Il n’a pas su expliquer à l’avocat général pourquoi il commettait des agressions sexuelles alors qu’il était lui-même victime de viols. « Je ne sais pas. Une partie de moi me disait qu’il ne fallait pas le faire, mais je l’ai fait. » Il poursuit, visiblement soulagé :  « J’assume ce que j’ai fait,  j’ai pas d’excuse. Ca me fait du bien de tout dire. » Quant à savoir pourquoi à l’époque, il n’avait pas dénoncé les viols dont il était l’objet, « Avant j’étais victime, j’avais honte. Maintenant que je suis auteur, ca me fait du bien d’en parler. » Pour l’avocat de l’accusé, Me Annabelle Roy-Cross, son client est prisonnier de ce qu’il a subi durant son enfance et il reproduit les mêmes schémas.

Un avis que ne partage pas l’avocat des parties civiles, Me Smaïn Bennouar qui voit en lui quelqu’un de « très intelligent qui va mettre en lumière son coté de victime. »

Le procès se poursuivra demain où la parole sera donnée aux avocats de la défense et de la partie civile.

 

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