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« Il n’y aura pas d’exode calédonien vers la Polynésie », rassure Sonia Backès

©Sonia Backès

Après le troisième référendum de l’accord de Nouméa, la Nouvelle-Calédonie parait plus fracturée que jamais. Pour Sonia Backès, présidente de la Province Sud et cheffe de file du mouvement anti-indépendantiste, il faut entamer au plus tôt les discussions pour aboutir à un « nouveau statut dans la République » d’ici juin 2023. Des discussions qui pourraient concerner indirectement la Polynésie.

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« Ce soir, la France est plus belle car la Nouvelle Calédonie a décidé d’y rester ». Emmanuel Macron a acté, dimanche soir, les résultats du troisième référendum d’indépendance, qui clôt le cycle de 30 ans prévu par l’accord de Nouméa. Le résultat de cette consultation, pourtant, laisse le Caillou avec encore beaucoup de questions. Certes, le camp du non à l’indépendance a remporté pas moins de 96,49% des voix dimanche – bien plus que les 56,7% obtenus en 2018 et les 53,2% d’octobre 2020. Mais du côté du FLNKS, on ne reconnait ni la légitimité du scrutin dont la date, d’abord validée consensuellement, avait été contestée après la crise Covid de septembre dernier, ni sa validité. Pour appuyer cette contestation, le front indépendantiste peut mettre en avant l’abstention, passée de moins de 15% l’année dernière à plus de 55% dimanche. La participation est même tombée en dessous des 2% dans certaines communes à majorité Kanak : l’appel à la « non-participation » formulé ces dernières semaines a donc bien été suivi, certains leaders du FLNKS parlent de demander un nouveau vote, ou d’interpeller l’ONU… Bref, 33 ans après les accords de Matignon, et 23 ans après l’accord de Nouméa le Caillou reste, plus que jamais, divisé.

Pas question pourtant d’oublier ce scrutin côté loyaliste. « L’accord de Nouméa (1998) est terminé (…). Nous avons décidé en notre âme et conscience de rester français (…) Ce n’est plus négociable. Et c’est ça le sens de l’histoire ! » lançait ainsi Sonia Backès, présidente des Républicains calédoniens et cheffe de file du mouvement anti-indépendantiste au soir de l’élection. Les rêves tristes d’une indépendance au prix de la ruine, de l’exclusion et de la misère se sont brisés sur le récif de notre âme de pionniers, de notre résilience, de notre amour pour notre propre terre ». Contactée par Radio1, la présidente de la province Sud rappelle que ce vote est « juridiquement valide », malgré la non-participation des indépendantistes, qualifiée de « manœuvre pour ne pas avoir à assumer » une défaite électorale. « Le non a fait 75 000 voix à ce référendum, alors qu’au plus haut de la participation, en 2020, le Oui avait fait 71 000 voix, précise-t-elle. On a voté trois fois non à l’indépendance, dont on restera dans la France. Ca n’empêche pas de continuer à parler de tout ce qu’il y a à évoquer en Calédonie« .

A quand le retour à la table des négociations ?

Et il y a beaucoup à discuter. Si l’accord de Nouméa reste flou sur les suites du référendum en cas de triple « non », une partie des forces politiques calédoniennes s’étaient accordées, en mai dernier et sur proposition de l’État, sur une période « de stabilité et de convergence » de 18 mois. L’idée est de soumettre à un nouveau référendum, d’ici à juin 2023, un projet qui porterait sur un nouveau statut de la Calédonie dans la République. À cette date, l’accord de Nouméa, qui régissait jusqu’à présent les institutions du Caillou deviendrait quoiqu’il arrive caduc. Retour autour de la table ? Pas tout de suite pour les indépendantistes, qui après avoir dénoncé le « passage en force » du gouvernement parisien sur la question de la date du référendum, n’entendent pas reprendre les discussions institutionnelles avant les prochaines présidentielles et législatives. « Compréhensible », juge Sonia Backès, qui estime que beaucoup d’autres sujets peuvent en revanche être discutés d’ici là.

Parmi les sujets urgents, celui des finances publiques et des comptes sociaux, qui connaissent une crise profonde. La question aussi des trois usines de nickel, poumons de l’économie, dont deux sont en graves difficultés. Beaucoup à discuter, donc, avant d’attaquer les questions fâchent : mode de gouvernement, corps électoral, et statut « pérenne ». Au vu des résultats, la revendications indépendantiste est loin d’être oubliée. Mais « mettre des échéances en permanence tue l’économie, tue l’espoir des jeunes qui ont un horizon bouché », argumente Sonia Backès, « si un jour il y a une majorité qui veut l’indépendance, on peut reposer la question mais tant qu’il n’y en a pas, ça n’a pas de sens de la poser tous les matins ».

La Polynésie indirectement concernée

Seule satisfaction partagée des deux côtés de l’échiquier : le scrutin s’est déroulé sans violence. Les élus indépendantistes ont assumé leurs responsabilités électorales, y compris dans les communes où les bureaux de vote sont restés vides toute la journée de dimanche. Et les impressionnantes forces de maintien de l’ordre déployé par l’État ces dernières semaines n’ont pas connu d’interventions notables. Elles ne devraient toutefois être démobilisées du Caillou que très progressivement. Aux Polynésiens qui craignaient, en cas de troubles, d’importants mouvements de population vers le fenua – un scenario envisagé dans un rapport de l’assemblée – Sonia Backès adresse donc un message rassurant :« Même s’il va y avoir des tensions, même si la négociation ne va pas être facile, il n’y aura pas d’exode massif vers la Polynésie », assure la présidente de la province Sud.

La Polynésie suit tout de même de près ces débats, d’autant qu’elle pourrait y être indirectement impliquée. « On a vocation à engager personne dans nos négociations, mais ça peut avoir un intérêt, si la Polynésie le souhaite, d’avoir des discussions pour voir s’il y a des choses dans ce qu’on va construire pour la Nouvelle-Calédonie qui puisse intéresser la Polynésie, pointe Sonia Backès. Il n’est pas question pour l’un ou l’autre d’imposer quoi que ce soit, mais je pense qu’on a des problématiques communes, sur le plan sociétal ou institutionnel, et on peut avoir un intérêt à échanger, et même pour être plus « fort » en tant que collectivités de la République ».

 

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