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Il pousse la population de Taha’a à bout, le tribunal lui interdit d’y retourner

Un homme de 45 ans, soigné pour des troubles psychiques, était jugé ce jeudi pour des violences, outrages, atteintes aux biens et incivilités à répétition commises à Taha’a, et notamment à l’encontre des gendarmes à qui il voue une haine féroce. Déclaré pénalement irresponsable par un expert, puis finalement responsable de ses actes par une contre expertise, son cas a créé un certain embarras au tribunal. « Je n’aimerais pas être à votre place », a déclaré son avocat aux juges, qui l’ont ensuite condamné à 12 mois de prison dont six ferme, et à une interdiction de paraître à Taha’a pendant deux ans.

« Voilà une personnalité fortement déconcertante », remarque la procureure. Dans le box du tribunal correctionnel ce jeudi, un homme de 45 ans ne cesse de couper la parole au juge, qui, plutôt calme d’ordinaire, élève la voix à plusieurs reprises pour lui intimer de se taire. Ce sans-domicile fixe, en détention provisoire depuis la mi-septembre, est jugé pour rébellion, outrage à personne dépositaire de l’autorité publique, violence sur personne vulnérable, destruction de bien et violences. Des faits commis entre avril et septembre, sur une île où il a pris l’habitude de terroriser la population depuis quelques temps, après avoir déjà été condamné en 2023 pour avoir détruit des rétroviseurs.

Son spot favori, c’est le distributeur automatique de l’île. C’est là qu’il erre, urine et éructe au gré de ses humeurs. Quiconque le contrarie ou le regarde de travers en subit les conséquences. Un octogénaire lui reproche notamment la destruction d’une vitre de sa voiture. Le prévenu assume, et justifie le coup par un mauvais regard et une manoeuvre qu’il juge dangereuse. Une autre victime assure avoir été touché aux fesses, puis boxé à la tête, le tout agrémenté de quelques insultes homophobes et de gestes à caractère sexuel : « un vieux comme lui qui parlait à ma nièce, je n’ai pas aimé, c’est un pédé », relate le mis en cause. Une dame enfin évoque des jets de pierre, il répond qu’il visait un chien. Des faits à répétitions qui ont conduit la banque à le bannir : il est désormais contraint de retirer son argent à Raiatea.

« Rentre chez toi raerae, ici c’est moi le boss », dit-il au commandant de gendarmerie

Mais ce qui l’irrite par-dessus tout, ce sont les gendarmes. Il leur voue une rancune tenace, depuis un vol qu’il prétend avoir subi et qu’il ne cesse de dénoncer durant toute l’audience. Un homme – cité comme victime dans l’affaire pour avoir reçu des pierres lancées par l’intéressé – lui aurait volé sa carte bancaire. N’ayant pas trouvé de suite favorable auprès des gendarmes, il le leur fait payer depuis. Le commandant de la brigade locale rapporte ainsi des insultes fleuries : « pédé, rentre chez toi raerae, ici c’est moi le boss ». « Ce jour-là, il ne m’avait pas dit bonjour, ça m’a énervé », plaide le quadragénaire. Une autre fois, il a boxé une adjudante, qu’il décrira, elle et ses deux collègues, comme « deux putes et un pédé, des gendarmes français de merde ». « C’est parce que mon voleur n’a pas été arrêté », hurle-t-il. Sa véhémence crée une gêne visible dans la salle. À Taha’a aussi où « il fait peur à la population », selon l’une de ses victimes, qui demande, comme deux autres, une interdiction de paraître sur l’île. « Taha’a c’est chez moi » s’emporte celui qui a pourtant toutes ses attaches à Tahiti. « Dès que ce sera fini, je retourne là-bas ».

« Tout le monde peut voir que cette personne n’est pas dans un état normal »

« Je suis un peu gêné, tout le monde peut voir que cette personne n’est pas dans un état  »normal » », lance son avocat. Bénéficiaire de l’allocation Cotorep après un coup à la tête reçu lors d’un accident du travail, il dit entendre des voix depuis. Il suit actuellement un traitement par injection pour ses troubles psychiques. Et pourtant, une contre-expertise demandée par le juge a bien estimé que le discernement de cet homme n’était pas aboli, déjugeant ainsi un premier psychiatre. « Nous sommes face à une vraie difficulté quand à la place de monsieur. Il n’y a pas de bonne décision. Soit on le met en psychiatrie et il sort après quinze jours, soit on le met un peu en prison. Mais dans tous les cas, c’est mettre du plâtre sur une jambe de bois, je n’aimerais pas être à votre place », poursuit l’avocat en s’adressant aux juges. Pour le conseil, « l’éloignement ne va pas régler le problème, puisqu’il pourra très bien recommencer autour de la cathédrale de Papeete, ou près du distributeur d’une autre banque, à Tahiti ».

Les juges ont finalement tranché pour une peine mixte : douze mois de prison, dont six avec sursis probatoire de deux ans et une obligation de soin et d’indemniser les victimes. Avant même d’être reconnu coupable, il avait fait savoir qu’il ne comptait rien payer. Le tribunal a en outre prononcé son interdiction de paraître à Taha’a, où il résidait depuis une décennie, pendant deux ans.

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