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Justice : « La Planète brûle » veut faire fermer la décharge de Faa’a

©C.R. / Radio1

Après une première victoire sur la station d’épuration de Tiapa, à Paea, la jeune association a déposé un recours contre la mairie de Faa’a. Elle lui reproche de refuser de mettre fin à l’exploitation de la décharge de Mumuvai, malgré des conséquences environnementales largement documentées. La mairie, elle, dénonce une procédure « téléguidée » et assure que le site est en pleine modernisation.

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Nouveau combat pour « La Planète brûle ». Après une première victoire en justice contre la mairie de Paea, qui a été contrainte de procéder aux travaux de réhabilitation la station d’épuration de Tiapa, la jeune association s’attaque, cette fois, à la mairie de Faa’a. Elle a saisi le tribunal administratif de Papeete pour obtenir « la cessation d’exploitation », en d’autres termes la fermeture, de la décharge de Mumuvai située sur les hauteurs de Saint-Hilaire.

Ce dépotoir, ouvert en 1964 sur des terres privées, n’est pas un inconnu du palais de justice. Le site est notamment l’objet d’une vaste procédure pour occupation illégale, engagée par les ayants-droit des plus de 60 000 mètres carrés de terre qui ont été, au fil des ans, utilisés pour enfouir les déchets de la commune. Un bras de fer qui n’est pas fini puisque, comme le précisait Tahiti Infos en octobre, le dossier d’indemnisation a été renvoyé devant la Cour d’appel de Paris par le Conseil d’État. Mais c’est surtout sur le plan environnemental que la décharge et ses 25 000 tonnes de déchets sont pointés du doigt.

Les juges déjà plusieurs fois saisis

On se souvient notamment de ce rapport de la Chambre territoriale des comptes (CTC) qui recommandait en 2018 la fermeture pure et simple du dépotoir. Conflit foncier, absence d’autorisation des services compétents du Pays, absence de « protection du milieu » naturel alentour, d’étude d’impact, « danger » pour les riverains ou les agents municipaux, risque de saturation… Les magistrats financiers avaient même pointé le coût de la structure, qui déséquilibre gravement le budget annexe des déchets de la commune. Et préconisé le rattachement de Faa’a au syndicat Fenua ma, à son CET de Paihoro et son centre de tri de Motu Uta, auquel la commune d’Oscar Temaru est la seule, à Tahiti, à ne pas avoir adhéré. Le chef de file indépendantiste avait longuement répondu à la CTC, balayant une série de critiques et expliquant que le risque sanitaire et environnemental de Mumuvai étaient minime face à ceux des essais nucléaires.

Quelques années plus tôt, fin 2014, une information judiciaire avait aussi été ouverte par le parquet pour des faits de « pollution, d’exploitation non autorisée d’une installation classée, et dégradation du bien d’autrui ». Le juge d’instruction en charge de l’affaire avait nommé un expert pour évaluer l’impact environnemental de la décharge. Son rapport, dont Tahiti Infos s’était procuré les premières conclusions en 2022, évaluait à 700 000 tonnes la quantité de déchets déversés au fil des ans sur le terrain, et démontrait la présence de « lixiviats » s’écoulant vers la rivière Piafau. Il décrivait aussi une pollution importante des sols, de même que des impacts sur l’air, notamment lors des incendies qui se déclarés une quinzaine de fois sur le site entre 2007 et 2019.

« Cadre illégal »

Des constations reprises et développés, entre autres arguments, par La Planète brûle pour demander la fermeture du site qui selon elle continue de fonctionner dans « un cadre illégal ». « Le traitement des déchets doit être fait dans des centres d’enfouissement technique, avec des normes bien particulières, explique l’avocat de l’association. Il doit y avoir, par exemple, des casiers qui permettent l’évacuation des lixiviats, conformément à des normes spéciales qui font l’objet de contrôle, et ce n’est pas le cas actuellement. »

Association « partiale » et « téléguidée » pour la mairie

En milieu d’année dernière, la Planète brûle a donc envoyé à la mairie de Faa’a une demande formelle de cesser l’exploitation de sa décharge. C’est le silence de deux mois de la municipalité – un « rejet implicite » en droit administratif – qui a permis à l’association de saisir les juges en octobre. Ce qui n’empêche par le directeur municipal de l’environnement de se dire « surpris » par la démarche. Roland Bopp s’étonne surtout de ne pas avoir été contacté pour des discussions en amont de cette procédure au tribunal. « Un manque de courtoisie », que le responsable attribue à une démarche partisane. « Pour moi, l’association est trop partiale,  je pense qu’elle est  téléguidée, confie Roland Bopp. Derrière c’est pour se faire de la petite pub pour sa petite association, obtenir des subventions … » À l’entendre, l’association devrait « traiter le problème dans sa globalité » et se pencher sur les cas des décharges « de Rangiroa ou Raiatea qui pollue peut-être davantage ».

Quant au fond du problème, le directeur de l’environnement précise que le site de Mumuvai est en cours de réhabilitation – des travaux seraient en cours sur le profilage des talus, la gestion des lixiviats et des eaux pluviale, « selon les recommandations faites par les experts » – et que ces travaux qui s’inscrivent sur le « long terme ». Il ajoute que le site est  « régulièrement surveillé » par l’Ademe – une agence d’État qui accompagne les collectivités sur les questions énergétiques et environnementales, mais ne mène pas de contrôles contraignants.

« Il y a un problème, on le connait, il existe des moyens de le résoudre »

« Téléguidée », La Planète brûle ? Non, seulement concernée, répond son président Florent Bizard. L’association créée il y a tout juste trois ans et qui compte seulement trois membres a été justement pensée pour mener des recours en justice ciblée sur des atteintes importantes à l’environnement.  « On ne cherche pas à dire ce qui est bien ou pas, on dit simplement que là il y a un problème, qu’on le connait, qu’il existe des moyens de le résoudre, précise le président de La planète brûle. Et qu’on veut que ça s’améliore. »

Jeudi, le président du tribunal administratif Pascal Devillers a cité la requête de l’association parmi les « affaires susceptibles d’avoir un retentissement en 2024 », sans préciser le calendrier d’instruction de ce dossier.

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