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Les co-gérants de La Dépêche jugés pour entrave au droit syndical

Dominique Auroy et Pierre Marchesini étaient jugés ce mardi par le tribunal correctionnel pour entrave au fonctionnement du comité d’entreprise, à celui du comité d’hygiène et de sécurité, et rupture sans autorisation de contrats de travail de délégués syndicaux. Les faits remontent aux années 2014-2016 alors que les deux hommes étaient co-gérants de la Dépêche de Tahiti. Ils risquent 894 974 Fcfp d’amende. Le jugement a été mis en délibéré au 4 mai.

Le procès devant le tribunal correctionnel de Papeete avait déjà été repoussé cinq fois, en octobre 2017 car le conseil de l’époque de Pierre Marchesini déclare un conflit d’intérêt avec son client, en février 2018 pour une question de charge d’audiences, en septembre 2018 où deux QPC sont présentées par les avocats des prévenus, en avril 2020 pour cause de Covid-19 et en juin 2020 car Me Bennouar, l’avocat de Dominique Auroy, est en quatorzaine. C’est dire s’il y avait de l’impatience au tribunal correctionnel pour cette sixième audience, qui sera la bonne, plus question de renvoyer quoique ce soit ce mardi, malgré l’absence de Dominique Auroy et de son conseil et celle de Pierre Marchesini. Des absences qui ont « agacé » le tribunal qui s’est interrogé sur le « mépris » des prévenus. L’avocat de Pierre Marchesini, Me Lamourette, est même interrogé par le président : « Me Bennouar est sans nouvelle de son client, explique-t-il. Il voulait vous envoyer un mail. » Étonnement du président : « Un mail ? Quand je suis ici, ce n’est pas pratique ! »

« Toutes les situations ne peuvent pas être réglées par l’application des textes », se défend Pierre Marchesini

Les deux hommes comparaissaient devant le tribunal correctionnel pour des faits qui se sont déroulés entre 2014, date de leur arrivée dans l’entreprise, et 2016 : entrave au fonctionnement d’un comité d’entreprise, rupture sans autorisation de contrats de travail de délégués syndicaux, entrave au fonctionnement du comité d’hygiène et de sécurité. Dominique Auroy et Pierre Marchesini étaient alors co-gérants de la société SNC la Dépêche de Tahiti. Trois anciens salariés et des représentants syndicaux s’étaient constitués partie civile. Un salarié mis à la retraite d’office et deux autres envoyés en congé forcé puis interdits de rentrer sur leur lieu de travail, des subventions au comité d’entreprise non versées puis à moitié, des bilans financiers jamais transmis, puis des protocoles où la direction « s’engage à respecter les dispositions légales ». Ce qui fera dire au président du tribunal correctionnel : « C’est la moindre des choses. » Et pourtant même cette « moindre chose » n’est pas respectée. Une représentante de la Direction du travail raconte des réunions qui ont lieu où on promet de donner les explications la prochaine fois mais finalement les jours suivants, des déménagements de salariés ont lieu, des décisions sont prises, des travaux sont faits. Aucune obligation n’est respectée. « La vie d’une entreprise n’est pas de tout repos. Toutes les situations ne peuvent pas être réglées par l’application des textes », l’explication de Pierre Marchesini lue par le président laisse le tribunal songeur. Le salarié mis à la retraite d’office ? « C’est lui qui l’a demandé. » Les deux salariés licenciés alors même que la direction du travail n’avait pas donné son accord ? « Ils étaient dangereux. »

« Ça transpire le mépris à tous les étages » dit la procureure

Le président du tribunal cherche une explication : « Mais pourquoi ne pas suivre les textes ? C’est du mépris ? De l’arrogance ? » La représentante de la Direction du travail essaie d’analyser : « Je pense qu’ils voulaient faire ce qu’ils voulaient. M. Marchesini ne voulait pas entendre ce que j’avais à lui dire puis M. Auroy a pris le relais. Il était courtois mais ne répondait à aucune de mes demandes. » Me Lamourette, qui défend Pierre Marchesini, qualifie son client d’homme « haut en verbe, qui ne laisse pas insensible » et demande sa relaxe pour plusieurs chefs d’inculpation, plaide sa bonne foi pour les autres, charge Dominique Auroy qui s’est acheté « des instruments de pouvoir » et pour qui Pierre Marchesini « n’était qu’un pion ». Les amis de 30 ans ne seraient plus du tout amis. On n’aura pas la version de Dominique Auroy. Quand la procureure démarre ses réquisitions, elle commence par pointer « la honte » de ce dossier, renvoyé maintes fois et au bout de quatre ans, l’absence des prévenus. « Ça transpire le mépris à tous les étages. La défense est hallucinante : ce n’est pas la bonne masse salariale pour comptabiliser la subvention du CE ; pour le CHSCT, ils s’assoient sur le code du travail, les bras m’en tombent ! » Et elle regrette que les deux co-gérants n’encourent que 894 974 Fcfp d’amende, le maximum légal, ce qu’elle demandera. Les trois salariés demandent également des indemnités au titre des préjudices moraux et financiers. Le jugement a été mis en délibéré, il sera rendu le 4 mai prochain.

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