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Quand on a que les coups à offrir en partage

Steven I, 34 ans, comparaissait ce lundi pour violences conjugales. Il a frappé sa concubine à l’aide d’un ordinateur portable. Déjà condamné à plusieurs reprises pour des violences,  cette fois il a été condamné à 2 ans de prison dont un avec sursis.

Insultes et violences supplantent vite la parole quand Steven I., 34 ans, perd ses nerfs. Et cela lui arrive régulièrement avec sa concubine avec laquelle il vit depuis 14 ans. Bon nombre de fois son père, qui vit dans le voisinage, a du intervenir pour le calmer, lors des nombreuses altercations qui émaillent la vie de ce couple qui a deux enfants.

Au début du mois d’octobre, Steven s’en est de nouveau pris à sa concubine pour une histoire de rame neuve. Car c’est un rameur et il compte bien participer  à la prochaine édition de la Hawaiki Nui Va’a. Tous les matins il s’entraîne et se rend même sur son lieu de travail en pirogue, dans un hôtel de Bora Bora. Cette rame, il l’aurait retrouvée par terre et accusé sa femme de l’avoir jetée au sol.

La sortant du lit aux aurores, il l’insulte, lui donne des coups de pied et s’empare d’un ordinateur portable pour lui en asséner un coup. Il la touche au niveau de l’arcade sourcilière qui se met à saigner abondamment. Puis il l’entraîne de force dans la salle de bains, « pour m’étrangler » dira sa compagne, « pour la nettoyer » affirmera t-il à  la barre.

Quelques jours après les faits, sa compagne, le visage marqué, se rend à la gendarmerie pour y retirer des papiers administratifs. Voyant les marques sur son visage, une auxiliaire de la gendarmerie l’interroge sur l’origine de celles-ci. Et là, elle craque. Elle qui avait gardé sous silence ce qu’elle subissait régulièrement se libère. Pour autant, elle ne porte pas plainte. C’est la gendarme qui a signalé les faits et le parquet qui s’est emparé de l’affaire, vu que l’homme était sous le coup de la récidive. À son actif, trois condamnations pour violences volontaires.

En garde à vue, Steven a minimisé les faits. Le coup sur la tête avec l’ordinateur, il ne l’a pas fait exprès, et la strangulation dans la salle de bains, « c’était pour la calmer, car elle n’arrêtait pas de crier alors que je voulais lui nettoyer le sang. »

« J’aime ma femme »

À la barre, il remet ca. Il nie. « J’aime ma femme » dit-il, mâchoires crispées et regard noir. « On vous reproche de la frapper, ce n’est pas compatible avec l’amour » lui rétorque le juge Bonifassi.

Dans la salle, sa compagne, petite silhouette, refrène ses larmes. Elle triture son mouchoir et demeure prostrée. De temps à autres elle jette des regards à son tane où se mêlent peur et pitié. C’est en pleurs qu’elle se présente à la barre.

« Je confirme ce que j’ai dit aux gendarmes, mais je n’ai pas porté plainte. » précise-t-elle. « Est-ce que ce monsieur vous fait peur ? » l’interroge le juge. « Non, je suis inquiète pour lui. Je veux qu’il rentre à la maison. (….) Je veux qu’il redevienne comme avant. Depuis qu’il touche à la drogue, il a changé.» Steven s’adonnerait depuis quelques années à la fumette.

Le juge, surpris : « Vous souhaitez reprendre la vie commune ? » « Oui ». « Et que voulez-vous qu’il fasse ? » « Qu’il signe la croix bleue. Je sais qu’il nous aime. ». Le juge : « Il a déjà signé une fois la croix bleue, mais cela n’a pas marché. Qu’est-ce qui vous fait dire que cela va marcher cette fois ? » « Ça a marché la croix bleue, la première fois, jusqu’à qu’elle soit finie. »

« La croix bleue n’empêcherait pas les faits de se reproduire »

Pour la procureure de la République, Audrey Gambin, « C’est un dossier désagréable et déconcertant. Lors de sa garde à vue, il avait reconnu plus ou moins sa culpabilité, et là il fait machine arrière. La victime est sous son emprise. (….) La croix bleue n’empêcherait pas les faits de se reproduire au regard de ses antécédents. » La magistrate requiert trois ans de prison dont un de sursis.

Pour l’avocat de la défense, Me Grattirola, « C’est un dossier relativement fréquent. Mon client peut être très calme et d’un seul coup basculer dans la colère. » Et de citer le roi Hérode qui aurait fait assassiner son épouse sur un coup de colère. Se tournant vers son client, « C’est un brave homme, il ramène des sous, mais quand il a un déclic, tout peut arriver. (….) Madame, aussi,a une forme de pathologie. Ils ont besoin d’aide. Qu’attend-on, qu’il prenne sa rame et qu’il la lui casse sur la tête ? » Pour l’avocat, les services sociaux auraient du s’occuper d’eux et « ce n’est pas la prison qui va régler cela. »

Le délibéré tombe. Steven est condamné à 2 ans de prison dont un avec sursis avec un suivi médical pendant deux ans et son maintien en détention.

À l’annonce du délibéré, sa compagne se lève en pleurs,  tenant son mouchoir devant sa bouche, implorant, « Pourquoi il ne peut pas rentrer ? Je suis toute seule à la maison. »

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