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«Vous avez énormément de chance qu’il n’y ait pas eu de mort»

« Nous avons entendu un gros choc, et vu des débris de scooter voler dans tous les sens. »
©Florent Collet / Radio 1

Alcool au volant, conduite sans permis ou sans assurance et souvent les trois. C’est le lot des audiences correctionnelles en juge unique, une semaine sur deux. Un échantillon de ceux qui ont maintenu les chiffres de l’insécurité routière 2020 au même niveau que 2019 malgré le couvre-feu et le confinement.

T.R. est de ceux-là. À lui seul, il a causé un total de 158 jours d’ITT à 5 victimes. Au petit matin, à Teva I Uta, il s’est déporté sur sa gauche. Le véhicule arrivant en face n’a rien pu faire et a été percuté de front, derrière d’autres véhicules sont venus le percuter. « Vous avez énormément de chance qu’il n’y ait pas eu de mort. Quand on prend la route le matin, si on a le malheur de croiser quelqu’un comme vous, on ne rentrera pas forcément le soir », remarque le juge. Il questionne T.R. sur les raisons qui l’ont poussé à prendre le volant sans permis et sans assurance. « J’allais au district », lui répond-il. « Mais quel est le rapport avec le fait que vous conduisiez sans permis ? » s’agace le juge sans avoir de réponse pertinente. Il ne sera pas plus avancé sur le fait que T.R. se soit endormi au volant à 6h30 du matin.  « Il conduit depuis toujours sans permis » note le procureur en rappelant que T.R. a déjà été condamné pour conduite sans permis en 2005 et 2006. « Ce qui devait arriver, arriva. Cela aurait pu être pire, mais c’est déjà grave. » Il requiert 1 an de prison dont 6 mois avec sursis. Il écope finalement de 18 mois de prison dont 9 mois avec sursis et l’obligation d’indemniser les victimes. Avec des frais qui s’élèvent à plusieurs millions, ces dernières vont devoir désormais s’engager dans une nouvelle bataille judiciaire pour obtenir leur indemnisation. T.R. n’a que de faibles revenus au noir de 40 000 francs mensuels. Le Fonds de garantie assure le relais dans ce genre de situation mais, seulement quand le condamné est l’unique responsable. En raison du carambolage, ce sont les assurances de tous les conducteurs impliqués qui vont désormais se retrouver devant la justice civile.

« Amené par les gendarmes, il aura moins le sourire »

Déjà condamné à trois reprises pour conduite en état d’alcoolémie, M.S. arrive à la barre avec le sourire. Un rictus dont il ne va jamais se départir au point d’irriter le procureur. Le 1er mai 2020, les gendarmes sont appelés pour un couple en train de se disputer dans la servitude Sage à Punaauia. Sur place, il retrouve l’épouse à côté du véhicule conduit par son conjoint « Il est très alcoolisé, je ne l’ai jamais vu dans cet état », explique-t-elle. Les gendarmes veulent le soumettre à l’éthylotest, mais M.S. profite qu’ils aient le dos tourné pour tenter de prendre la fuite en courant. Il est rapidement stoppé par un gendarme. « Vous aviez le véhicule de votre père, les gendarmes étaient avec votre conjointe. On vous aurait retrouvé, où vous pensiez pouvoir aller ? » ironise le juge. M.S. rigole presque : « Je ne sais pas, c’est l’alcool.» Une attitude loin de celle adoptée au moment des faits, quand il avait asséné un coup de poing au gendarme qui voulait le stopper. Les forces de l’ordre avaient alors eu bien du mal à menotter le trentenaire. « C’était la première fois que je conduisais sans permis », assure M.S.. Après avoir bu une demi-caisse de bière et du vin en bas de sa servitude, sa conjointe l’avait appelé à 23 heures pour lui dire qu’elle rentrait à pied, chez elle à Paea. « Je voulais passer la nuit avec elle et avec le couvre-feu, il ne fallait pas qu’elle rentre chez elle », justifie le jeune homme dont la profession de conducteur d’engin de chantier rend perplexe le magistrat. « Il sourit, mais il est dans une mauvaise situation. Alcool, rébellion, sans permis, il est à la limite de l’incarcération. La prochaine fois, ce sera en comparution immédiate, il sera amené ici par les gendarmes et il aura moins le sourire. » M.S. parvient enfin à contrôler son rictus qui cesse totalement à la menace du juge : « Vous savez que nous pouvons confisquer la voiture de votre père. » Au final, il écope d’un an de prison avec sursis, l’obligation de suivre des soins et 156 heures de travaux d’intérêt général. Un délibéré clément pour M.S. à en juger par son sourire retrouvé.

Cauchemars

Taina, elle, n’a pas le sourire. Elle est pourtant une victime et c’est A.M. qui est à la barre. La conduite de ce dernier n’est pas passé inaperçue auprès des autres automobilistes. « Même quand il n’y avait pas de véhicule à doubler, il restait sur la file de gauche, et ne cessait de zig-zaguer. À un moment, nous avons entendu un gros choc, et vu des débris de scooter voler dans tous les sens. », a relaté un témoin. Après avoir bu toute la journée et fumé du paka avec un ami, A.M. a repris le guidon de son scooter sans assurance pour parcourir les quelques kilomètres séparant de Papenoo à Hitia’a. Sa route sinueuse finira sur le pare-chocs de Taina qui subit encore moralement les séquelles de ce triste jour, au point d’en faire des cauchemars.

« Il est la principale victime de ses propres agissements, il a longtemps été hospitalisé, n’a pas repris le travail depuis 6 mois et n’a plus de salaire », défend l’avocate de A.M. « Je ne veux pas inverser les rôles, mais il n’arrivera plus à marcher normalement. » Au final, A.M. est condamné à un an de prison dont 6 mois avec sursis. Il devra suivre des soins contre l’alcool et les stupéfiants et indemniser Taina et son conjoint à hauteur de 120 000 francs.

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