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CBD et cannabis médical : le Syndicat polynésien du chanvre « vigilant » sur le rôle de l’Institut Louis Malardé

Le Syndicat polynésien du chanvre se déclare globalement satisfait du projet de loi sur le cannabis que le conseil des ministres vient de valider. Mais il se dit aussi préoccupé par le rôle que joue l’Institut Louis Malardé dans le processus de mise en place d’une véritable filière, et veut rester vigilant. Son président Philippe Cathelain explique pourquoi la loi devra prévoir une « tolérance » sur la teneur en THC des variétés de cannabis qui seront cultivées.

Après l’abrogation de la loi « Tapura » sur le sujet, le gouvernement a tenu sa promesse de proposer son propre texte avant la fin de l’année. Validé par le conseil des ministres cette semaine, il va entamer son cheminement législatif, Cesec, commission parlementaire, vote en plénière à l’assemblée. « Il y aura encore 4 ou 5 arrêtés d’application qui devront suivre, dit le président du Syndicat polynésien du chanvre Philippe Cathelain, notamment sur les conditions d’importation des graines, l’inscription des variétés dans un catalogue officiel, les critères d’instruction des demandes d’agrément par exemple. »

« Mais ce qui nous préoccupe le plus, ce sont les travaux qui sont menés par l’ILM, on ne sait pas si ça se passe bien ou pas bien », dit-il. Des travaux dont les résultats sont attendus pour 2025 – « Pour nous, c’est déjà trop long » –  et qui doivent déterminer d’une part quelles sont les variétés les plus riches en CBD, sans dépasser une teneur en THC de 0,3%, pour les usages « bien-être » et, éventuellement, l’export vers les pays qui en ont libéralisé le commerce dans cette limite, et d’autre part quelles sont les variétés les plus riches en THC, qui ont des applications médicales potentielles, mais dont la dispensation sera réservée aux médecins ou pharmaciens.

Une production en conteneurs ?

« On encourage l’ILM, sur ça il n’y a pas de problème, reprend Philippe Cathelain. Mais on a des réserves sur le mode de production. » Il s’alarme un peu de constater que l’ILM procède à ses tests de culture dans des conteneurs, éventuellement alimentés par panneaux solaires. « Ce n’est pas le modèle que l’on souhaite promouvoir. On a des conditions climatiques qui sont idéales. Si c’est pour leurs recherches scientifiques, c’est bien, mais faut pas venir après nous imposer un modèle de production. On estime que ce n’est pas au législateur de nous dire comment il faut planter. »

Une demande de « tolérance » des variétés plus puissantes

La Polynésie offre des conditions climatiques tellement idéales que certaines variétés, même validées par l’ILM, pourraient dépasser la teneur de 0,3% de THC lorsqu’elles seront mises en culture. Il cite notamment une étude réalisée à La Réunion, en partenariat avec le syndicat national Interchanvre et l’Agence nationale de sécurité du médicament, qui a montré toute la difficulté de maintenir un taux réduit de THC dans les variétés cultivées en milieu tropical. C’est pourquoi le Syndicat polynésien du chanvre voudrait conserver dans la future loi, ou du moins dans ses arrêtés d’application, une « tolérance » jusqu’à 1%, comme le texte du Tapura le prévoyait. Ces fleurs plus puissantes seraient alors utilisées en dilution pour des huiles ou des crèmes, par exemple.

Très mesuré, Philippe Cathelain rappelle toutefois que ce sera dans l’intérêt des producteurs de rester « dans les clous » d’une teneur en THC de 0,3%, « sinon on se fermerait la possibilité d’exporter. » Les variétés au plus fort taux de THC seraient réservées à un usage médical, pour des médicaments préparés par des pharmaciens et délivrés sur prescription. Mais là encore, le rôle de l’ILM doit être clarifié, dit Philippe Cathelain.

« Le pire des scénarios pour nous, c’est que certaines personnes développent un programme de recherche et de culture du cannabis sur fonds publics, mais à des fins d’intérêts privés », dit le président du Syndicat polynésien du chanvre. Une crainte alimentée par l’équipement dont se dote l’Institut Louis Malardé, qui pourrait lui permettre d’être au moins un « transformateur » de fleurs de cannabis pour l’industrie médicale, et de se substituer aux futurs acteurs privés. « Dans le budget 2024 il y a 80 millions pour acquérir un extracteur, on peut considérer que ça rentre dans le cadre de la dérogation qui a été accordée à l’ILM pour mener ses recherches, mais on trouve tout de même que c’est beaucoup pour des recherches qui doivent durer deux ans. Et il y a aussi 20 millions pour équiper leurs conteneurs de panneaux solaires, on trouve ça un peu ridicule. » Pour Philippe Cathelain, le futur rôle de l’ILM doit être limité aux analyses.

 

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