ACTUS LOCALESPOLITIQUE Le gouvernement pourrait demander la rétroactivité de la loi fiscale Charlie Réné 2024-04-10 10 Avr 2024 Charlie Réné Le ministère de l’Économie et des Finances va demander à l’assemblée, ce jeudi, d’appliquer de façon rétroactive la nouvelle mouture de la loi fiscale annulée par le Conseil d’État. C’est en tout cas ce que croit savoir le Medef, qui rappelle sa ferme opposition à un texte qui, sur le fond, n’a pas vraiment évolué depuis décembre. Cette rétroactivité, gage de simplicité pour l’administration et pour les entreprises contribuables, serait aussi très risquée juridiquement, d’après les élus de l’opposition, qui ont eux-mêmes déposé des amendements. La séance de ce jeudi promet du débat. Lire aussi : dialogue de sourds autour de la loi fiscale Rendez-vous très attendu ce jeudi à l’Assemblée de Polynésie française. C’est la première fois depuis le début de l’année que les élus de Tarahoi sont réunis en plénière, pour l’ouverture de la session administrative. Comme à chaque première séance, le président de l’assemblée, Tony Géros, et celui du gouvernement, Moetai Brotherson, vont se relayer au micro. L’occasion de sonder l’ambiance au sein de la majorité Tavini, dont les tensions alimentent toutes les rumeurs ces dernières semaines. Les leaders bleu ciel démentent régulièrement les bruits de motions de défiance – « le malaise, il est dans l’opposition », répondait récemment Moetai Brotherson – sans toutefois cacher des différences de vues, ou, du côté de l’assemblée, une certaine impatience de voir des réformes ambitieuses, arriver sur la table. Casse-tête pour l’administration… Et certaines entreprises Mais la séance de jeudi sera aussi l’occasion d’étudier quatre textes, qui ont suivi, comme très souvent ces derniers temps, une procédure d’urgence en commission. La convention sur l’organisation des Jeux de Tahiti 2027 devrait provoquer quelques discussions, de même que la réforme des conditions d’installation des pharmacies, objet d’un important contentieux ces dernières années. Peu de débats à prévoir sur le toilettage du budget de l’assemblée. En revanche, les échanges devraient durer autour de la nouvelle version de la « Loi du Pays portant diverses mesures fiscales ». Une première version de ce texte avait été votée à Tarahoi le 15 décembre dernier, après avoir été au centre d’une passe d’armes au sein de la majorité Tavini. Ces remous – « le simple débat démocratique » assurait alors le gouvernement – avaient compliqué et au final vicié la procédure d’adoption de la loi fiscale. Qui avait donc été annulée pour des raisons de forme, le 25 mars, par le Conseil d’État. Le gouvernement n’a pas traîné pour relancer le processus législatif, avec un texte seulement épuré de quelques mots, pour prendre en compte les demandes – et les nouveaux recours potentiels – de l’ordre des avocats. Mais une question restait en suspens, celle du remboursement des impôts trop perçus, ou du redressement des contribuables avantagés, depuis le début de l’année, du fait de la loi censurée à Paris. Hôtellerie, immobilier et surtout automobile… L’annulation, puis la ré-application, à trois ou quatre mois d’intervalle, d’une loi fiscale est un casse-tête pour l’administration. Et ce même si les sommes en jeu – 400 à 500 millions de francs « net » d’après Tony Géros – ne pèsent pas grand chose face aux difficultés budgétaires de certains satellites du Pays (CHPF, OPT, OPH), qui doivent tous être « renfloués » lors du premier collectif budgétaire de l’année. Le gouvernement « cherche à annuler les effets de la décision du Conseil d’État » Le ministère de l’Économie et des Finances aurait toutefois trouvé une solution pour éviter à son administration – et à certains comptables du privé – la pénible tâche de régulariser trois mois de fiscalité. D’après une note diffusée par le Medef à tous ses membres, Tevaiti Pomare va proposer, ce jeudi, en séance, un amendement qui permettrait de rendre rétroactif la nouvelle mouture de la loi. En clair, cette deuxième version aurait les mêmes effets que le texte voté courant décembre : il serait applicable dès le 1er janvier. « Cette initiative émane du Secrétariat du Gouvernement, qui cherche à annuler les effets de la décision du Conseil d’État afin de limiter les perturbations pour les entreprises du Pays », écrit le nouveau président de la fédération patronale, Steeve Hamblin. Tevaiti Pomare devrait aussi justifier la manœuvre par le nécessaire « équilibre du budgétaire » du Pays… Pas de quoi convaincre le Medef, qui « a toujours exprimé son opposition à cette loi fiscale, aussi bien sur le fond que sur la forme, malgré les affirmations contraires du ministre en commission de l’Assemblée ». Une dizaine d’amendements déposés par l’opposition L’organisation se dit aussi « bien consciente des possibles recours qui pourraient être engagés » contre cette rétroactivité, et contre le texte en général. Un doute partagé par plusieurs élus de l’opposition, où on cite des jurisprudences « claires » du Conseil d’État qui interdirait une telle rétroactivité… Et où on s’étonne que le gouvernement choisisse de « fragiliser » un texte qui a déjà fait couler tant d’encre. Aucune confirmation, pourtant du côté de l’exécutif, qui, comme les rapporteurs du texte, n’a pas à déposer ses amendements en avance. Rien n’assure, donc, que Tevaiti Pomare fasse effectivement la proposition de cette rétroactivité… Et difficile de critiquer juridiquement un dispositif légal qui n’a pas été présenté officiellement. Quoiqu’il en soit, cette manœuvre ne sera pas le seul objet de discussion de la journée. Une dizaine d’amendements ont aussi été déposés avant la date limite de ce mardi midi, par les élus de A Here ia Porinetia et par le groupe Tapura. Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)