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En Nouvelle-Calédonie, Macron promet « de ne pas passer en force », mais pose ses conditions

Au dixième jour des émeutes, le président Emmanuel Macron a effectué une visite de moins de 24 heures en Nouvelle-Calédonie. L’occasion de rencontrer les institutions, les politiques de tous bords, y compris de la CCAT, et les représentants du monde économique du Caillou. Le chef de l’État a voulu ouvrir le dialogue de façon large, mais exige la levée immédiate des barrages et la fin des violences. Sans retirer le projet de loi constitutionnelle, il accepte de reporter son vote pour laisser la place aux discussions. Quant au sauvetage de l’économie et à la reconstruction, l’État annonce des aides d’urgence, mais pas encore de chiffres. Les précisions partenaire Les Nouvelles Calédoniennes. 

  • Pas de « passage en force », mais… Après une journée marathon d’échanges et de rencontres avec les différentes forces politiques, institutionnelles et économiques du pays, Emmanuel Macron a clos son déplacement express, par une conférence de presse qui s’est déroulée vers minuit, cette nuit (heure de Nouméa).  Le chef de l’Etat a promis de ne « pas passer en force » sur la réforme du corps électoral à l’origine des émeutes en Nouvelle-Calédonie et a souhaité un vote des Calédoniens en cas d’accord politique global sur le statut institutionnel du Caillou. Dans ce contexte, Emmanuel Macron a dit donner « quelques semaines » supplémentaires aux parties (indépendantistes et loyalistes) pour négocier et il s’est engagé à faire un point d’étape « d’ici un mois » sur l’avenir institutionnel de l’archipel. Des annonces néanmoins conditionnées à la levée des barrages « dans les heures qui viennent » qui permettra, par là même, de lever l’état d’urgence en vigueur dans le pays. « La question aujourd’hui est de retrouver la confiance, entre les parties prenantes et les forces politiques, entre les forces politiques et les élus en particulier les maires, entre le monde politique et les forces économiques, et la confiance collective dans l’avenir de la Nouvelle-Calédonie », a martelé Emmanuel Macron.

 

  • La CCAT dans les discussions. Lors des échanges entre les différents camps politiques et le président, la présence de Christian Téin, chef de file de la CCAT, parmi les indépendantistes n’est pas passée inaperçue. Le président de la République, qui estime que ce mouvement est « protéiforme » assume cette décision : « Ils (les élus indépendantistes) me disent que la CCAT est une organisation politique, qui a eu recours à la violence, ce que nous désapprouvons, que nous condamnons, que nous poursuivons et que nous judiciarisons. Mais puisque c’est une organisation politique, ils (les élus indépendantistes) ont souhaité qu’elle soit autour de la table auprès d’eux pour qu’elle puisse s’engager, explique le chef de l’Etat. J’ai considéré qu’il était plus efficace d’accéder à leur demande que d’y opposer un non. Je considère avoir fait le maximum d’efforts possibles pour permettre un retour au calme. J’attends maintenant d’eux l’esprit de responsabilité. « De là à reporter le Congrès de Versailles (dernière étape pour valider ou non cette réforme constitutionnelle et le dégel du corps électoral) prévu en juin ? Emmanuel Macron ne se risque à aucune réponse ferme. « Aujourd’hui, mon souhait est de pouvoir obtenir l’arrêt des hostilités et donc la levée des barrages et des points fixes, le retour au calme, la fin de l’état d’urgence, la reprise du dialogue. Sur cette base, à ce moment-là, je serai le premier à proposer qu’on prenne plus de temps pour avoir un accord global qui rentre dans la constitution, conclut le chef de l’Etat. Au moment où je vous parle j’ai exprimé ma volonté dans ce sens. Mais dans la mesure où je n’ai reçu aucun engagement ferme en retour et je n’ai rien constaté, j’attends et j’exprime mon intention », ajoute Emmanuel Macron, jugeant bon d’ajouter une dernière précision : « Cette réforme, dans la mesure où elle a été votée dans les mêmes termes par l’Assemblée Nationale et le Sénat, il appartient au président de la République, soit de la soumettre au Congrès de Versailles, soit de la soumettre au référendum. »

 

  • Une aide d’urgence exceptionnelle pour l’économie et la reconstruction. Le président a par ailleurs promis une « aide d’urgence » après les dommages « colossaux » provoqués par les émeutiers. Pour traiter ce dossier, lui aussi brûlant, la ministre déléguée aux Outre-mer Marie Guévenoux restera jusqu’à la fin de la semaine sur le Caillou et une mission consacrée à cette problématique sera créée, avec des hauts-fonctionnaires envoyés sur place mais également une « équipe dédiée » à Paris. « La priorité ira vers une aide d’urgence pour payer les salaires, pallier aux problèmes de trésoreries des entreprises avec un engagement des assureurs et également des prêts à taux zéro pour accompagner l’ensemble des professionnels, annonce le chef de l’Etat. Ce qui sera structuré dans les prochains jours, c’est la mise en place d’un fonds de solidarité pour venir en aide au monde économique afin d’aider salariés, gérants et indépendants. » En parallèle, l’Etat procèdera à une « mesure d’exception et d’urgence » pour la reconstruction des bâtiments publics, dont les écoles et les collèges.

 

  • Reflexions sur la reconstruction. À la sortie de la réunion avec le chef de l’Etat, le sénateur Georges Naturel s’est exprimé devant la presse :  » On a beaucoup parlé de la situation du monde économique en général. Et l’autre sujet que l’on va continuer à débattre, c’est la reconstruction de l’économie, qui a beaucoup perdu et de l’accompagnement des chefs d’entreprise dans l’immédiat et sur le long terme. Il y a aussi la réflexion pour savoir comment on reconstruit notre société sur le long terme. Cela passe par un projet social en partenariat avec le monde économique pour reconstruire d’une autre manière qu’auparavant. On a tous reconnu, et moi le premier, que le bilan de l’accord de Nouméa n’est pas parfait et qu’on a tous fait des erreurs, nous les élus calédoniens. Il faut donc qu’on fasse en sorte de pouvoir construire différemment en accompagnant la jeunesse et pouvoir avoir un vrai projet de société. Après, il y a le projet politique et institutionnel, mais nous n’en avons pas encore débattu. » Le retour de la circulation passe par deux choses : des forces de sécurité, avec des renforts qui vont encore arriver nous a dit le président de la République. Mais on est tous convaincu que ça ne suffira pas. Il faut aussi des messages forts politiques, des messages en tant qu’élus calédoniens, de pause, pour pouvoir discuter sereinement. » Il va falloir qu’on retrouve et condamne les commanditaires parce que ce qui s’est passé comme ça en Nouvelle-Calédonie ne s’est pas fait en un claquement de doigt. On voit sur le terrain que c’est organisé. » Sur le sujet du corps électoral, ce sera au président de la République de nous annoncer, je ne sais pas si ce sera ce soir, ce qu’il en est d’une pause ou pas. »

 

  • Pas de « retour en arrière ». Emmanuel Macron appelle à un « apaisement constructif » et à la recherche d’une « solution » politique, mais sans revenir sur le résultat des trois référendums qui ont acté le maintien du territoire ultramarin dans la République. « L’apaisement ne peut pas être le retour en arrière. L’apaisement ne peut pas être de ne pas respecter l’expression populaire qui s’est déjà jouée. L’apaisement ne peut être de nier en quelque sorte un chemin qui a déjà été fait », a dit le chef de l’Etat devant des élus et représentants des forces vives de l’archipel, secoué par une plus d’une semaine d’émeutes. « Néanmoins, nous devons remettre toutes les parties prenantes autour de la table », a-t-il plaidé.

 

  • Pas de départ des forces de l’ordre pour les Jeux. Les quelque 3 000 forces de sécurité déployées en Nouvelle-Calédonie face aux récentes émeutes « resteront aussi longtemps que nécessaire, même durant les Jeux olympiques », a promis le chef de l’État en se disant plutôt défavorable à une prolongation de l’état d’urgence, à condition que les barrages soient levés. « La première chose, c’est l’ordre, le calme, la paix et la situation qui est encore aujourd’hui en cours, évidemment me préoccupe », a déclaré le chef de l’Etat à Nouméa. Après avoir observé une minute de silence en hommage aux six morts de ces derniers jours, il a notamment déploré des épisodes de « racisme » dans « l’accès à l’alimentation » et souligné « la grande détresse de beaucoup de nos compatriotes sur les questions d’accès aux soins ».

 

  • Hausses de prix « illégales » dans les magasins. En pleine visite présidentielle, le gouvernement calédonien a constaté que certains commerçants profitent des circonstances d’émeutes pour augmenter « de manière exagérée » les prix de leurs produits dont certains sont réglementés, et qui par conséquent ne peuvent pas subir de telles hausses. Cette pratique, illégale, est d’autant plus inacceptable et intolérable, en particulier en cette période où la solidarité et la responsabilité collective doivent primer, fustige, dans un communiqué, le gouvernement, qui tient à rappeler à l’ensemble des commerçants l’importance de pratiquer des prix « contrôlés, justes et raisonnables ». Afin de garantir le respect de ces principes et de protéger les consommateurs contre toute forme d’abus, l’exécutif annonce mettre en place « des mesures strictes » de contrôle des prix, sans en dévoiler davantage. « Le gouvernement est fermement déterminé à protéger le pouvoir d’achat des citoyens et à garantir des pratiques commerciales équitables et compte sur la coopération de tous les commerçants pour traverser cette période avec solidarité et responsabilité. »

 

  • Retirer la réforme, ce serait « faire gagner la violence, pour Nicolas Metzdorf. Au Haut-commmissariat, les élus calédoniens commencent à affluer et détaille aux médias leurs attentes pour cette rencontre.  » J’attends qu’Emmanuel Macron donne les moyens aux forces de l’ordre pour rétablir la paix. Qu’il constate la réalité du terrain en Nouvelle-Calédonie. Pour proposer des bonnes solutions il faut faire un bon constat, explique le député Nicolas Metzdorf, rapporteur du très contesté projet de loi constitutionnelle. La mission du dialogue ce n’est pas ce qui va régler les choses et pour moi ce n’est pas ça. Pour moi c’est une reprise en mains du dossier par Emmanuel Macron. Je suis plus que jamais opposé au report du Congrès de Versailles, ce serait faire gagner la violence ». Le président du Congrès Roch Wamytan, plutôt discret depuis le début de la crise, est lui aussi haut-commissariat mais n’a pas souhaité faire de déclaration à la presse.

 

  • « Le retour au calme le plus vite possible ». Dès sa sortie de l’avion, le président Emmanuel Macron a pris la parole sur le tarmac de La Tontouta. « Ma volonté est d’être au côté de la population à Nouméa et que le plus vite possible ce soit le retour à la paix, au calme, à la sécurité ». Sur la durée de sa visite, le président de la République assure n’avoir « pas de limite » de temps sur place et promet que des « décisions seront prises » à l’issue de ses entretiens.

 

  • Le chef de l’État a atterri à la Tontouta à 8h30 heures de Nouméa (11h30 à Tahiti). Après une brève allocution sur le tarmac, et un survol de la zone urbaine de Nouméa en hélicoptère, le président, accompagné, entre autres, par le ministre de l’Intérieur et des Outre mer Gérald Darmanin, la ministre déléguée aux outre-mer Marie Guévenoux, le ministre des Armées et ancien ministre des Outre-mer Sébastien Lecornu, doit se rendre au haut-commissariat. Il doit s’y entretenir  avec le Haussaire Louis Le Franc puis participer à une rencontre républicaine avec l’ensemble des élus de Nouvelle-Calédonie et les acteurs économiques.

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1 Commentaire

  1. Tiare
    23 mai 2024 à 13h22 — Répondre

    E. Macron promet de ne pas passer en force ?
    ….Donc, il le fera ! Comme tout ce qu’il promet …..

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