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Rocky Aitamai rêve d’une « remontada » pour prendre la tête du foot tahitien


Les candidats à la présidence de la Fédération tahitienne de football ont jusqu’à ce jeudi soir pour déposer leur liste avant l’élection du 3 février. Cette année, Rocky Aitamai, cadre de l’AS Vénus, conseillé et soutenu par Reynald Temarii, veut renverser le sortant Thierry Ariiotima. Meilleurs terrains et meilleure formation des jeunes pour assurer des médailles à l’international, regain d’intérêt pour les îles, gratuité de licences… Un programme qu’il développe tout en demandant le report de l’élection, en raison « d’insécurités juridiques ».

C’est un homme « très discret » de son propre aveu, qui souhaite prendre la tête d’une des fédérations sportives les plus importantes du pays. À 57 ans, Rocky Aitamai est le candidat d’une liste composée, entre autres, de cadres de l’AS Pirae, Tamarii Punaruu, Manu Ura ou encore de son club, l’AS Vénus, dont il est le vice-président de la section football. « On conteste beaucoup les décisions de la Fédération, donc on s’est dit qu’il était bien de s’engager pour changer la manière de la gérer », débute-t-il.

Rocky Aitamai a dressé sa liste après un premier constat : « En 2015, lorsque Thierry Ariitoma a pris la tête de la fédération, nous avions 16 000 licenciés. Aujourd’hui, nous en avons un peu plus de 10 000, alors que dans le même temps, le budget de la FTF est passé de 200 à 400 millions », pointe le candidat. Parmi ses projets phares, la réinstauration de la gratuité des licences pour les seniors, vétérans, et dirigeants. « Elles sont payantes depuis 2015, malgré l’augmentation de budget », poursuit celui qui, via cette mesure, souhaite « aider les bénévoles » pour endiguer la perte de licenciés.

Objectif Coupe du monde

Les bénévoles, un socle sur lequel le candidat souhaite s’appuyer pour redynamiser le haut niveau. Il en a d’ailleurs fait son slogan électoral (« Le bénévole au cœur de l’avenir »). « Nous n’avons rien gagné en élite depuis 2015 », tacle-t-il (depuis 2012 en réalité, en ce qui concerne le foot à 11). S’il épargne les sélectionneurs dans son analyse, celui des Toa Aito Samuel Garcia en tête, « certaines incompétences dans les staffs » sont relevées ici et là, et son constat est implacable : « le niveau de nos joueurs a baissé ».

« Nos U17 et nos U20 ne se qualifient pas aux Coupes du Monde (ce fut tout de même le cas en 2019 pour les U20) et nous ne gagnons pas la médaille d’or aux Jeux du Pacifique alors que d’autres sports collectifs y arrivent avec un budget dix fois moindre », enchaîne-t-il encore. En cas d’accession à la présidence, Rocky Aitamai souhaite donc « aller chercher l’or aux Jeux de Tahiti en 2027, et pourquoi pas la qualification à la Coupe du monde de football d’ici deux éditions ». Une ambition confortée par la récente réforme de la Coupe du monde, qui stipule que deux places peuvent désormais revenir à l’Océanie : un ticket direct pour le vainqueur du tournoi qualificatif et une place en barrage au finaliste. Mais cette ambition nécessite également « un travail de fond dans les clubs pour avoir des jeunes plus performants et donc une équipe élite plus performante dans les prochaines années ».

Le beach soccer coûte trop cher

Un travail de fonds aussi. « Nous allons appuyer la formation et l’encadrement, en mettant en place une cellule technique pour développer les clubs ». L’idée étant de leur faciliter l’accès aux diverses possibilités de financement, en leur offrant un appui pour « monter des projets et des dossiers de subvention », ce qui pêche dans certains clubs, pas toujours au courant de tous les filons existants.

Et parmi ceux-ci, celui de la Fifa, puisque le programme de développement de la Fédération internationale devrait « augmenter son budget de 40% d’ici 2026 ». De quoi aider les clubs donc, en lançant aussi des chantiers structurels. Rocky Aitamai aimerait ainsi étudier l’installation de terrains synthétiques aux quatre coins de Tahiti et dans les îles, « qui permettraient des entrainements de qualité ». En prenant des exemples locaux, avec les bons résultats de Tefana qui dispose d’un tel terrain, et régionaux, avec les Calédoniens bénéficiaires en 2011 de subventions pour trois terrains « et qui sont devant nous au classement Fifa ».

Encore une fois, cela reste conditionné à une augmentation du budget. À défaut, et loin de vouloir se lancer dans une gabegie, le candidat envisage d’équilibrer certains financements. À commencer par ceux attribués au beach soccer. « C’est important car ça apport une belle image. Mais les coûts de déplacements sont énormes : pour une coupe du monde, le déplacement revient à environ 50 millions, pour peut-être 7 millions de gains. On ne veut pas tout supprimer, mais on va réfléchir à tout ça ». Une réflexion qui pourrait aussi se porter sur la masse salariale, qui pourrait être réduite « notamment au niveau des postes administratifs » ajoute celui qui se targue d’avoir une liste composée de nombreuses personnes du privé, à commencer par Heimana Salem, chef d’entreprise : « faire des bénéfices, c’est notre quotidien ».

L’oreille à laquelle murmure Reynald Temarii

De bons gestionnaires donc, une liste « jeune », et accompagnée de vieux renards du milieu. À commencer par le plus célèbre d’entre eux, Reynald Temarii, sous-marin dont le périscope n’est jamais bien loin. Si l’ancien vice-président de la FIFA ne pouvait pas être sur la liste – après avoir purgé 8 ans de suspension sur décision de la Fédération internationale « il a repris une licence il y a moins de six mois » – Rocky Aitamai reconnaît bien volontiers avoir sollicité ses services comme conseiller.

« Nous avons fait appel à lui, car son expérience de la fédération nous aide beaucoup dans l’analyse. Il nous aide à mettre en forme nos idées », justifie celui qui se défend d’être « manipulé » par l’ancien ministre des sports, toujours mis en examen pour corruption passive. « Reynald a beaucoup changé : avant, il faisait passer ses idées, maintenant il écoute et il trouve les moyens pour les mettre en place. Il a d’ailleurs repris en main l’équipe U7 de l’AS Pirae et se rend compte des difficultés qu’il y a sur le terrain. Lui aussi est convaincu que le bénévole doit avoir plus de place », souligne Rocky. Et à la question concernant l’attribution d’un poste à Reynald Temarii en cas d’élection, le candidat coupe court : c’est « non ».

Une campagne électorale dans les îles, les « oubliées du football polynésien »

L’ancien vice-président de la Fifa n’est pas le seul à soutenir cette liste. Rocky Aitamai revendique ainsi de nombreux appuis dans les îles. Ce qui ne l’empêche pas d’en chercher d’autres : après une réunion de présentation face aux clubs de Moorea mercredi soir, il sera aux Raromatai ce week-end et fera campagne aux Marquises dans la foulée. Des terrains éloignés, au cœur de son projet peaufiné depuis septembre avec son équipe.

« Notre grand travail, ce sont les îles, qui représentent 56% des licenciés de Polynésie mais qui ont été délaissées. Nous souhaitons écouter leurs besoins », enchaîne-t-il, prenant pour exemple les projets de développement : « en 2020, sur 17 formations, deux seulement ont été données dans les îles » affirme-t-il. Si ce constat n’est plus tout à fait le même en 2022-2023 – avec un calendrier faisant état de 35 formations en Polynésie pour huit dans les îles (quatre aux Marquises, deux au Australes et deux au Raromatai), « les îles ne sont pas la priorité du bureau actuel, elles sont les oubliées du football polynésien, notamment à Bora Bora la discipline a disparu » martèle Rocky Aitamai. S’il est élu, le 3 février, le cadre de l’AS Vénus promet d’intégrer un dirigeant des îles Sous-le-Vent dans le Comité Exécutif. De quoi lui assurer le soutien de « tous les clubs de Huahine et d’un bon groupe de Raiatea ».

Un appui nécessaire, puisqu’il concède lui-même ne pas partir favori dans cette élection. « On est confiants, on pense à faire la ‘’remontada’’, même si on est loin parce que nous sommes face aux gens qui sont au pouvoir, avec les adresses et les affinités. Donc on essaye de convaincre par un projet ». Et les « remontadas », Rocky Aitamai dit en savoir quelque chose, en soulignant son bilan à l’AS Vénus, « un club dans lequel je me suis engagé avec Roland et Nicolas Sanquer quand il était en Ligue 2 , avec peu de jeunes, et que nous avons mené en O’League dix ans après ». Cette fois, le match se joue sur un tout autre terrain. Réponse attendue le 3 février… Si tout se déroule selon le calendrier prévu.

« On demande de reporter l’élection »

Rocky Aitamai et sa liste pointent « une insécurité juridique au niveau des élections », puisque « la FTF a modifié ses statuts mais ne respecte pas les statuts type », établis par le Pays en 1999. Il explique également que des irrégularités apparaissent dans le calendrier de l’élection, notamment en ce qui concerne les délais de convocation. Certains clubs n’auraient également pas le nombre de votes auxquels ils devraient avoir droit selon les « statuts type » de la fédération. Ce qui pourrait donc entrainer de nombreux recours après l’élection. « On a déjà écrit à la DJS, au COPF et à la Fédération pour avertir de l’insécurité juridique. Il vaut mieux la corriger et ensuite faire les élections. Ces courriers sont été envoyés le 4 janvier, maintenant on attend les réponses ». Soulignant que « le ministère des Sports a prolongé la date de renouvellement des fédérations à fin juin (d’ordinaire, les élections doivent se tenir dans les trois mois suivant les Jeux du Pacifique), on ne risque pas d’être hors-délais, donc on demande de reporter l’élection ». Le président sortant Thierry Ariiotima aura prochainement l’occasion de donner sa version des faits, puisqu’il présentera son programme au micro de Radio1.

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